Le Monde de Kalamaï
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Précédemment


Lulyane distingua de fort loin la lueur opalescente de la Tour qui éclatait dans le bleu du ciel.

Quelque chose s’anima en elle, une sorte d’onde la parcourait, une vague chaude qui devenait plus intense à mesure que son domaine approchait. Un sentiment de bien-être l’envahit, la sillonnait toute entière : elle arrivait enfin chez elle…

Elle fut étonnée de voir défiler sous elle une vallée fertile, verte et boisée, parcourue de part en part par une rivière à l’ondée rafraîchissante. Pendant la traversée des montagnes, la bise avait été glaciale, même si elle n’en avait pas souffert. Partout, les sommets se couvraient de blanches congères, c’était le royaume du froid, de la neige et de la glace.

Et puis soudain, la température devenait clémente, l’atmosphère se faisait tiède comme par une belle journée de printemps. Ce lieu enchanteur était enchanté ! Une force magique maintenait cette vallée dans un climat contre-nature.

Et pourtant, tout autour de ce cirque enchâssé entre de hauts sommets, la glace et la neige gagnaient du terrain. Lulyane distinguait parfaitement les contours originels du vallon, et comprenait que le froid de l’altitude s’avançait de plus en plus.

Le givre grignotait les premiers arpents au pied des rocailles. Une épaisse couche de flocons couvrait les premières frondaisons des bois périphériques. Le début de la rivière, à l’embouchure du torrent, se durcissait d’une solide gangue de glace.

Tout le trajet, Grognar était resté tapi au fond de son panier pour ne pas se rendre compte de la hauteur à laquelle il évoluait. Tout juste avait-il par instant accepté de sortir le bout de son nez rougi par le froid pour indiquer le chemin. Mais à l’approche de son chez-lui, l’excitation était la plus forte et il glissa un œil par-dessus l’osier. Et lui aussi constata que la vallée - sa si chère, si giboyeuse, si poissonneuse vallée, sa vallée si généreuse en produits de la terre - était en train de s’engourdir sous le manteau glacial de l’hiver permanent.

Quant à la Tour, elle ne présentait plus du tout l’aspect qu’il lui connaissait. Tout l’étage supérieur avait disparu. Ça et là, sur toute la hauteur de la muraille, des pierres s’étaient descellées, de larges lézardes balafraient les parois. Et à son pied, tout autour du bâtiment, les morceaux épars de la ruine en cours s’amoncelaient en de vulgaires tas de gravats.

L’Iltarn se posa au sommet du Mont Roc-Pointe, éminence centrale et conique de la vallée. A sa suite, les griffons assurèrent une lente descente jusqu’à ce que la nacelle touche le sol, puis se posèrent rapidement.

Lulyane fixait la Tour avec ébahissement, incapable d’en détacher son regard, abîmée dans une fascination que rien ne pourrait interrompre. Ce lieu était à elle ! Ce n’est pas qu’elle s’en réjouissait, qu’elle en concevait quelque fierté ou quelque orgueil, juste qu’elle le ressentait intensément, que tout son être, jusqu’au plus profond de ses viscères venait de s’ancrer définitivement dans la pierraille aride de ce sommet chauve et dans la blancheur irréelle de ce monument millénaire.

Plus loin, sortant de leurs cabanes en poussant des cris gutturaux, une troupe de géants accouraient vers eux, les bras tendus, les dents brandies du bonheur de retrouver Grognar.

Devant ce déferlement, Biquette, qui elle avait tenu à jouir du spectacle aérien et avait passé le voyage debout sur ses pattes arrières pour observer le paysage, fut prise d’une soudaine inquiétude pour son intégrité physique. Elle sauta de la nacelle et courut se réfugier tout contre les jambes de la vampire, seul rempart qui lui semblait solide pour éviter de se faire dévorer.

Fous de joie et incapables de se contenir, les géants se jetèrent en meute sur leur chef, le bousculant, allant jusqu’à le faire tomber à la renverse.

- Du calme, du calme ! s’esclaffait Grognar qui lui aussi cachait mal sa joie. Moi aussi, je suis content de vous voir, bande de cons !

Renversé, retourné, bientôt enseveli sous une mêlée de corps gigantesques, Grognar laissa échapper sa besace, qui tomba quelques pas plus loin en s’ouvrant. La tête du vampire jaillit, roula sur une courte distance en laissant s’accrocher le tissu qui l’enveloppait dans les cailloux rugueux.

Lulyane, debout dans un face-à-face avec l’Opaline, ne prêtait aucune attention au tumulte des retrouvailles. Elle sentit seulement la tête nue venir cogner contre son pied et baissa le regard.

Appuyée contre sa cheville, la tête du vampire avait les yeux ouverts et la regardait.

Dernière édition par Lulyane le Jeu 5 Aoû 2010 - 0:11, édité 2 fois

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Lulyane fut tirée de sa contemplation pour s’abandonner à une autre. Elle s’accroupit pour ramasser la tête et la tint dresser devant son regard.

Rivant ses yeux dans ceux du vampire, elle cherchait à déceler ce qu’il restait de conscient en lui. A la fois mort et vivant, ce crâne intact, aussi frais et charnu qu’au premier jour de sa décollation, ouvrait les yeux sur le monde sans pourtant paraître le voir.

C’était une impression étrange que d’observer ce regard fixe, ces globes clairs qui ne portaient pas les symptômes habituels du trépas : ce voile vitreux et cette atonie de couleur et d’éclat… Bien qu’ils ne bougeassent pas dans leur orbite, ils présentaient un iris coloré, de ce bleu clair presque translucide qu’elle avait discerné dans la nuit de leur rencontre, une pupille dilatée, des cils légèrement animés pas le vent.

Moins que jamais, le vampire n’avait l’air mort. Il semblait tout au plus éteint, comme si l’action d’un quelconque bouton suffirait à le ranimer et à lui rendre la parole.

Lulyane cala la tête sous son bras comme l’on tient un casque.

- Allons, mon Maître. Faites-moi donc visiter votre demeure, murmura-t-elle.

Elle s’avança vers l’entrée, devant l’immense porte de bois, aux ferrures ouvragées, au linteau voûté en ogive et poussa l’un des battants. La Velue la suivait de près, ainsi que Biquette.

La grande salle de l’audience était plongée dans l’obscurité. Aucune fenêtre ne l’éclairait et pour y voir mieux, Lulyane chercha en vain du regard des torches fixées au mur. Nulle part elle ne vit de porte-flambeaux ni même de ces tâches noirâtres qui ornent les murs de tous les palais et qui témoignaient même en leur absence de la présence fréquente de torches allumées.

Mais peu après leur entrée, une faible lueur baigna la salle. Elle semblait émaner des murs eux-mêmes, comme si la pierre était capable de produire sa propre lumière. Lulyane distingua mieux le décor qui l’entourait. Au fond de la nef où elle se tenait, sur une estrade de pierre, il y avait dans l’exèdre du mur un trône noir. Constitué d’une pierre étrange, qui semblait à première vue la même que celle des parois mais au lieu d’émettre de la lumière, il paraissait plutôt qu’elle l’absorbait. Elle engloutissait toute luminescence ce qui rendait le trône d’un noir plus profond que le plus profond des noirs. Non pas une couleur mais une absence totale de couleur, la négation absolue de la teinte, comme un indice de ce à quoi pouvait ressembler le néant.

Autour d’elle, délimitant deux larges travées, une double rangée de trois massifs piliers qui paraissaient gondolés, distordus, comme si le poids de l’édifice se faisait trop lourd pour eux et qu’ils étaient sur le point de se tasser, se recroqueviller sur eux-mêmes, emportant dans leur compression l’ensemble du bâtiment.

- Bordel de Brak, qu’est-ce que c’est que ce foutoir ?

La voix de tonnerre de Grognar avait éclaté dans l’épais silence, amplifiée et répercutée par le vaste volume et les puissants murs. Le géant se tenait coi, ne reconnaissant rien du décor qui lui était si familier. Ni son éclat, ni sa splendeur, rien de tout ce qui rendait ce lieu si particulier. Au contraire, la Tour semblait se décomposer, pourrir lentement comme un fruit trop mûr qu’on aurait abandonné dans une corbeille.

Lulyane se dirigea d’instinct vers le fond de la salle pour y trouver un escalier. A gauche, il y en avait un qui montait vers les étages, à droite, un second dont la vis semblait s’enfoncer profondément dans les entrailles de la terre, dans les viscères de la Tour…

Et c’est ce dernier qu’elle choisit en toute logique, pour y trouver ce qu’elle visait, ou plutôt ce qui la guidait, car elle se rendait compte qu’elle avançait avec certitude sans avoir la moindre idée de ce qu’elle recherchait.

A la dernière marche, elle pénétra dans une salle au plafond en dôme soutenu en son milieu par une haute et large colonne. A nouveau, un éclairage faible et diffus s’extirpa des parois, laissant entrevoir une pièce totalement vide. Un sous-sol dénudé de toute décoration, démuni de tout ameublement. Un garde-manger ancestral, sans doute, une réserve alimentaire protégée des intempéries…

Un peu déçue, et ne comprenant pas surtout pourquoi son intuition l’avait conduite ici, elle s’apprêtait à faire demi-tour quand la tête glissa de sous son bras, tomba au sol et se mit à rouler jusqu’au fond de la chambre souterraine, du côté opposé à l’escalier. Elle s’arrêta net à quelques pas du mur, quand son élan aurait dû la conduire à le percuter.

Elle s’était déposée au centre d’une large dalle dont les bords étaient émoussés, dont les jointures avec le reste du dallage étaient imparfaites. On aurait pu glisser la largeur d’une main dans l’interstice.

- Grognar, j’ai besoin de ton aide ! Soulève cette dalle !

Le géant jaillit de l’escalier pour venir glisser ses doigts dans la fine fente et tira de toutes ses forces. Malgré sa puissante musculature et sa force colossale, rien n’y fit. La dalle ne bougea pas d’un pouce.

Et la sorcière, désormais formée et rompue aux secrets des arcanes, comprit rapidement qu’un sort avait scellé magiquement l’ouverture et qu’aucune force physique, aussi grande soit-elle ne pourrait en venir à bout.

Au cours de ses patients apprentissages dans les bibliothèques, elle avait pu connaître plusieurs sorts de fermeture et leur contre sorts, mais elle n’avait aucune idée de celui qui avait été utilisé ici. Et il s’agissait probablement d’un sort très puissant puisque son créateur était un mage à l’expérience pluriséculaire.

Pourtant, c’est elle qu’il avait choisi pour lui succéder et donc à elle, il le savait, que reviendrait la mission de dégager la dalle. Forcément, cette magie était à sa portée !

Elle brandit son bâton, sa Velue, pour s’octroyer plus de pouvoir et fixa les yeux du vampire pour se donner de l’inspiration. Cherchant en elle la formule appropriée, elle se laissa inonder par la mana qui se dégageait de ce lieu, laissa son esprit vibrionner parmi les nombreux charmes qu’elle avait mémorisés.

Et prononça à voix feutrée quelques paroles aux sons étranges, comme une langue d’un autre âge, d’un autre lieu.

Soudain, la dalle se souleva, s’éleva lentement dans l’air et glissa sur le sol où elle se déposa.

Lulyane flageola, poussant un long soupir. Ses jambes tremblaient légèrement, ses membres se relâchaient et échappaient à son contrôle. Elle se sentait vide mais parvint à se tenir debout.

- C’est lourd cette saloperie ! maugréa-t-elle.

Sous la dalle maintenant dégagée s’ouvrait un escalier droit, étroit et interminable. Elle commença de le descendre en se tenant au paroi, éprouvée encore de l’effort qu’elle venait de fournir.

La Velue, qui depuis le début observait tout, les lèvres pendantes, comblée de se voir plongée dans ces mystères magiques, se précipita à sa suite, excitée par la curiosité. Grognar suivit à son tour, moins convaincu de la nécessité de s'enfouir comme un renard dans son terrier.

Ce qu’ils découvrirent en bas échappait à tout ce que leur imagination pouvait produire.

Une salle cylindrique comme un silo enterré et dont on ne distinguait pas le plafond. Au centre, il y avait une borne rectangulaire, faite d’une pierre marmoréenne aux tons rouges et aux veinures bleutées.

Le pilastre mesurait environ quatre pas de hauteur, soit à peu près la même hauteur que la vieille naine. Dans le corps du pilier, une niche était ménagée et sur sa surface, il y avait un creux concave, large comme une main. Dans cette cavité était déposé un cœur qui avait cessé de battre.

Le long des murs, des tablettes de pierre en saillie, engagée dans les parois, s’ornaient de toutes sortes d’objets et d’artefacts magiques : livres, sceptres, anneaux, ceintures, manteaux,... Les yeux de la Velue brillaient de ravissement devant cette collection inouïe dont elle voyait déjà tout le profit qu’elle pourrait en tirer.

Mais pour quoi faire du profit maintenant ?

A leurs pieds, jonchant tout le sol de la crypte, des monceaux de pièces d’or, de bijoux et de pierres précieuses. Un trésor considérable comme on en voit dans les contes, une fortune incalculable !

Dernière édition par Lulyane le Jeu 29 Juil 2010 - 21:10, édité 1 fois

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Des richesses infinies, des artefacts offrant de grands pouvoirs, des livres emplis d’un savoir insondable… Elle n’avait pas encore visité la bibliothèque mais rien que ceux qu’elle avait sous les yeux, certainement les plus éminents, suffisaient à combler sa soif de connaissance.

Voilà de quoi elle avait hérité ! Voilà le legs que ce grand mage vampire avait choisi de céder à une simple paysanne.

La Velue courait de droite et de gauche sur le tas de pièces, insensible au doux tintement de l’or sous ses semelles tant elle était avide de jauger, de soupeser, d’examiner chaque objet.

Son rire emplit soudain la crypte. Elle tenait à la main un sceptre décoré d’une tête de mort au sourire grimaçant.

- Ah, ah, ah ! Une Mort-de-Rire ! Sertie de deux cristaux… Voilà un sceptre qui remplacera avantageusement votre Velue…

Se précipitant vers une autre tablette :

- Oh, et là… Un Magia Pro Doemisis… Le volume deux !

Elle prit l’ouvrage précieux entre ses mains avec d’infinies précautions, n’osant l’ouvrir car elle savait que seul un mage aguerri peut s'adonner à sa lecture.

Lulyane se désintéressait de tout cela. Pour l’heure, elle était surtout préoccupée par la stèle et par le cœur qui en occupait le sommet incurvé. C’est là donc qu’elle devrait placer le sien en remplacement de celui-ci ? Mais comment procéder ?

Le Gris !

Le Gris avait promis de l’aider, de rester connecté à son esprit pour la guider.

Elle ferma les yeux et tenta de s’enfermer en elle-même, oubliant ce que ses sens lui révélaient du monde autour d’elle, cherchant à n’être plus qu’un esprit dans un corps scellé de toutes parts.

Malgré tous ses efforts de concentration, elle fut incapable de reproduire l’exploit qu’elle avait accompli une fois. Non, elle ne ressentit pas sa pensée qui quittait son corps, qui devenait pure énergie et se déplaçait plus vite que le cerveau ne peut le concevoir.

Elle rouvrit les yeux, la mine contrite. Et son regard se posa sans qu’elle le veuille sur la niche qui creusait le corps de la borne. Une niche à la forme ovoïde… Juste assez grande pour contenir une tête…

Une tête ?

La solution claqua comme une évidence ! De sa vitesse indiscernable, elle gravit l’escalier quatre à quatre, grimpa la centaine de marche qui l’extirpait du cœur de la terre pour aller récupérer la tête de son créateur qui gisait sur le sol dallé, là-haut, dans le grenier souterrain. Avec la même rapidité, elle s’en saisit et redescendit dans la crypte. Elle était revenue à sa place alors même que ni Grognar, ni la Velue n’avaient eu le temps de distinguer son absence.

S’agenouillant devant la borne, elle glissa avec douceur la tête qui s’enchâssait parfaitement dans l’alvéole. Un éclair la projeta en arrière en même temps qu’éclatait un coup de tonnerre caverneux.

Allongée dans l’or et les pierreries, elle eut l’impression d’avoir perdu conscience et de rêver quand elle entendit résonner une voix en elle. Une voix qu’elle connaissait, qu’elle n’avait jamais oubliée : la voix qui l’avait ramenée d’outre-tombe.

- Je savais que tu saurais quoi faire ! Je ne t’ai pas choisie par hasard, Lulyane !

Eberluée, elle se redressa, assise dans les pièces et les lingots, face à la niche. Dans son logement, la tête avait toujours le même aspect : son visage immobile, ses yeux ouverts sur le vide. Qu’attendait-elle ? D’en voir bouger les lèvres ? De voir le vampire lui sourire ? De voir s’agiter une tête sans corps ?

- Remplace mon cœur par le tien, Lulyane ! Je te guiderai… dit la voix à l’intérieur de son crâne.

Grognar et la Velue, sidérés d’abord par le bruit et l’éclat lumineux dont ils n’avaient pas compris la cause, virent Lulyane se lever, se diriger sans faillir vers une tablette de pierre où elle saisit une dague, qu’elle prit sans hésitation parmi une dizaine d’autres. Ils ne pouvaient savoir que la voix dictait chacun de ses gestes.

Elle mit un genou en terre face à la stèle, joignit ses mains et murmura quelques incantations. Puis, portant ses deux mains en coupe, elle préleva soigneusement le cœur de son nid de marbre.

Aussitôt, le sol se mit à trembler, les murs à vibrer. La pierre luminescente s’éteignit, créant un noir total, puis se ralluma dans une blancheur éblouissante, clignota ainsi pendant de longues secondes pendant lesquelles il semblait que le sol s’ouvrait sous eux. Tombant des parois, du plafond, des pierres se détachaient, chutaient tout autour d’eux, les épargnant par miracle…

Lulyane, absorbée dans sa concentration, ne percevait pas l’apocalypse qui se déchaînait autour d’elle, tandis que Grognar et la Velue, paniqués, cherchaient à regagner l’issue sans y parvenir, secoués par les spasmes grognants de la terre, par les convulsions tonitruantes du sol.

Toujours à genoux, la vampire ne cessait d’incanter des formules que la voix inaudible lui soufflait. Elle appuya la pointe de la dague juste sous le globe de son sein gauche et l’enfonça profondément. Elle tressaillit, s’affaissa un peu dans un petit cri puis continua. Faisant remonter la lame, elle ouvrit une profonde entaille dans sa poitrine, laissa tomber la dague et plongea sa main dans la plaie ouverte et sanglante.

Elle s’arracha le cœur, sans cesser de psalmodier et le plaça dans la cavité sommitale du pilier de marbre.

Aussitôt, la colère de la terre s’apaisa. Les pierres tombées au sol s’envolèrent, légères comme la plume et regagnaient leur emplacement dans le mur. A nouveau, les parois irradiaient cette douce lumière, à la fois si vive et si tamisée.

Lulyane s’était tue. Elle regardait, hagarde, la déchirure qu’elle avait fait elle-même sur sa peau lisse. Elle regardait sans oser y croire la profonde entaille qui se refermait à vue d’œil.

Elle n’entendait plus la voix, elle se sentait épuisée, elle pensait qu’elle mourait encore mais cette fois, pour de bon, pour la dernière et définitive fois. Tout tournait, tout se troublait et elle s’écroula sur le sol.

N’osant croire à ce qu’ils venaient de voir, Grognar et la Velue se baissèrent vers elle et regardaient stupéfait son corps inanimé, qui ne respirait pas, dont le pouls ne battait pas, qui avait tout de la mort, jusqu’à la froideur…

Le géant ramassa la dépouille et la prit dans ses bras. Puis, il commença de monter l’escalier, portant le cadavre de celle qui aurait dû être sa patronne. La vieille marchande suivait, les yeux mouillés, bouleversée d’avoir perdu sa maîtresse. Aucun des deux ne doutait qu’elle fût morte et ils en concevaient une tristesse inconsolable.

Ils ne virent même pas, comme ils remontaient dans la Tour, qu’elle avait retrouvé tout son lustre et son éclat, que les lézardes s’étaient effacées, que les piliers s’étaient redressés, que les plaies avaient disparues et que la ruine était redevenue un édifice somptueux…

Ils ne virent même pas, avant de quitter la crypte, que sur la stèle, dans son écrin de marbre, le cœur s’était mis à battre.

Dernière édition par Lulyane le Mar 10 Aoû 2010 - 4:45, édité 1 fois

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Le Gris était à des lieux et des lieux de la Tour Opaline. Bien au chaud dans ses appartements, fouillant inlassablement les livres qui recouvrait sans fin les murs autour de lui. Tant de documents acquis avec les années dans le but de parfaire sa collection privé et ses connaissances. Il cherchait continuellement depuis le départ de Lulyane, désireux de répondre aux interrogations de la novice concernant la tour Opaline. Il ne dormait plus et lisait sans relâche chaque volume ayant pour sujet les vampires, les sorciers et les enchantements.

Soudain il trouva une bride d'information, ce n'était pas complet mais sûrement utile. Il se concentra et essaya de transmettre sa pensée à la comtesse.


Lulyane...

Lulyane...


Il ne percevait rien, craignant le pire. Le vieil homme caressa Ashan couché sur ses genoux, tirant bénéfice de l'animal pour étendre sa volonté vers la novice. Il constata avec effroi que son corps était inerte, mais aussi qu'elle était différente. Il sentait un coeur battre, elle qui pourtant était déjà morte par sa transformation en vampire. Avait-elle déjà réussi à donner vie à la tour ?

Le Gris persévéra, cherchant contact avec l'esprit de son élève. Transmettant lentement, une phrase à la fois,


Lulyane... je sais que tu peux m'entendre...
Ce que je ressens me donne l'impression que tu as réussi à sauver ta Tour...
Je te perçois faiblement, comme si tu quittais ton corps...
L'heure n'est pas au départ... tu es voué à de grands exploits ...
Reviens doucement vers l'écrin qu'est ta chair...
Reprend conscience et profite de la puissance qui t'entoure...
Une énergie intarissable émane de l'Opaline, sers-toi en..


Le mage avait un doute sur la qualité de la transmission, Lulyane n'était pas psioniste mais était en mesure de bien recevoir. Le fait qu'elle semble se dissocié de son corps pouvait être une barrière à la communication.

Il resta assis en tailleur, les yeux fermés et le dragonnet toujours sur ses genoux. Rien autour de lui ne pouvait le distraire et toute son énergie était dirigée vers la comtesse de l'Opaline.

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Il y avait d’abord eu le noir.

Le noir total, profond, assorti d’un silence assourdissant. Le néant de la pensée, le vide des sensations. La mort ! Irréparable, définitive, absolue…

Puis un lent réveil de l’esprit, de la conscience…

Par petites touches, le monde des vivants résonnait autour d’elle. Des sons ! Incompréhensibles… Des odeurs ! Inidentifiables… Un léger courant d’air sur sa peau glacée… Une mouche qui courait sur son bras… Une main qui serrait sa main…

La Velue l’avait veillée pendant les trois jours que dura son inconscience. Elle ne voulait pas se résoudre à la mort de sa maîtresse. Et pourtant, toutes les apparences étaient là qui parlaient d’elles-mêmes.

Plus de souffle, plus de cœur, plus de pouls, plus de vie… Si ce n’était pas la mort, qu’est-ce que cela pouvait être ?

Et puis, elle réfléchit. Et puis, elle réalisa. Et puis, elle comprit.

Lulyane n’était plus vivante depuis longtemps déjà. Comment pouvait-elle être plus morte que morte ? Moins vivante qu’une non-vivante ?

Effectivement, la vampire émergeait doucement par petites touches infiniment lentes. Il lui semblait que son esprit quittait son corps, se dissociait de son enveloppe charnelle pour baguenauder dans l’atmosphère désolée de la chambre. Sa dépouille reposait là, sur les draps de soie d’un lit au bois précieux ouvragé, sous le couvert d’un baldaquin aux colonnes torsadées. Mais son âme planait dans l’air lourd de la tristesse ambiante.

Il lui semblait que quelque chose l’attirait ailleurs, dans un autre plan d’existence, que quelque chose l’appelait… Irrésistible tentation, irrépressible envie de suivre cette invitation silencieuse et forte à la plénitude, à la béatitude. Désir de partir, de s’en aller, de quitter pour toujours ce monde… Inclination inéluctable à la découverte du cosmos, avec d’autres yeux, d’autres perceptions…

Puis, une voix. Une voix secrète, clandestine, impénétrable qu’elle était la seule à entendre. Une voix qui l’exhortait, la suppliait de rester dans cet univers. Une voix qui la rejetait à l’intérieur de son cadavre. Une voix amicale, bienveillante qui se voulait plus volontaire, plus convaincante que l’appel de l’au-delà.

"L'heure n'est pas au départ... tu es vouée à de grands exploits ..."

Ne pas partir alors ? Rester ? Mais pour quoi faire ?

"Reviens doucement vers l'écrin qu'est ta chair..."

Retourner, comme en nageant contre le courant dans un océan infini. Décupler ses efforts pour rejoindre la rive. Tout faire pour reprendre pied sur l’île accueillante de son enveloppe physique.

"Reprend conscience et profite de la puissance qui t'entoure...
Une énergie intarissable émane de l'Opaline, sers-t’en…"

L’énergie… La mana qui abonde… Tenter de la capter pour la faire sienne, pour s’en remplir…

Puis cette impression, depuis longtemps oubliée, d’un cœur qui bat. De son cœur ! Elle en ressentait le moindre battement comme s’il était en elle et comme s’il était en-dehors d’elle. Comme si son cœur, présent ailleurs, l’animait pourtant à nouveau du souffle de la vie.

Elle était toujours elle sans être la même. Elle n’était plus l’héritière de la Tour, elle était LA Tour ! Et son âme ne regagna pas son simple étui de chair mais le double récipient de sa peau, de ses entrailles et de la pierre mystérieuse deux fois millénaire.

Elle ouvrit les yeux.

Pour la première fois, elle réalisa que la puissance l’habitait. Elle n’était plus une petite paysanne frappée par la fatalité d’une mort non souhaitée, touchée par le don de la nuit contre son gré. Elle se sentait enfin une sorcière, une magicienne… Avec évidence ! Comme si son regard voilé avait déchiré le rideau opaque de son aveuglement, comme si toutes ces années s’étaient effacées pour laisser la place à un autre destin, à sa réelle condition.

Enfin, elle était elle-même !

Elle se redressa, assise sur le lit, et eut un regard vers la Velue, dont le sourire de bonheur ornait le visage radieux.

- Nous avons du travail, ma chère ! dit-elle simplement.

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Lulyane avait lentement pris possession des lieux. Elle avait visité la moindre pièce de la Tour afin de connaître parfaitement son domaine. Elle avait été ébahie par la splendeur du mobilier des chambres et des salons, par le luxe et la légèreté de l’architecture.

Elle avait passé des heures dans la grande bibliothèque où des ouvrages sans âge s’alignaient à perte de vue sur des rayonnages démesurés. Et son ambition première, celle de s’éloigner du tumulte des hommes pour s’adonner sans fin à l’étude et à la lecture, lui revint.

Ici, elle avait trouvé son refuge, dans cet océan de connaissances qui n’attendaient que d’être explorées. Loin du fracas des batailles et des déchirements humains, protégée de la haine et de la cupidité qui animaient les vivants, de leur inextinguible soif de destruction, de leur besoin inné d’acquérir le pouvoir en semant la mort.

Elle était descendue dans la crypte pour s’abandonner longuement dans un face-à-face avec ce cœur qui battait à nouveau. Quelle étrange impression que de voir sa vie palpiter en-dehors d’elle !

La Tour était sauvée, vibrait à nouveau, dispensait l’immense énergie qu’elle renfermait, lui offrait ses bienfaits. Elle comprenait à présent tant de choses sans les avoir apprises, comme si elles s’étaient instillées en elle. Elle faisait don à la Tour de sa vie qui lui rendait en échange son savoir millénaire dans une symbiose parfaite.

Dans la niche creusée dans la stèle, la tête du vampire jetait sur le monde un regard fixe et inanimé. Elle savait que son créateur avait désormais atteint un nouveau plan de conscience, qu’il n’avait pas disparu mais qu’au contraire il était plus vivant et présent que jamais. A présent inaccessible au commun des mortels, il allouait à l’Opaline une nouvelle capacité : celle de la pensée. Car la Tour communiquait avec elle intérieurement, elle était pourvue d’un cerveau qui lui permettait de guider et de conseiller sa nouvelle propriétaire.

Et quand elle tenta de joindre le Gris par télépathie, elle n’éprouva aucune difficulté car ce n’était pas elle qui jetait dans l’espace son esprit mais la Tour qui, servant d’émetteur, envoyait à des lieues de distance les mots qu’elle n’avait pas besoin de formuler.

Sa raison voyagea par-dessus les montagnes, au travers des forêts, s’insinua dans les rues populeuses de la capitale, glissa dans les couloirs de la Corporation, chercha le vieux Mage qu’elle trouva concentré, assis en tailleur, plongé dans une profonde méditation. Elle pénétra comme par effraction dans son esprit et lui parla :

- Mon ami ! C’est vous qui m’avez ramenée d’entre les morts. Sans vous, sans votre affection, sans votre volonté, je ne serais plus de cet univers. J’avais requis votre aide mais c’est bien plus que vous m’avez apporté. La Tour est sauvée et je suis à présent irrémédiablement liée à elle. Mon destin est le sien, son destin est le mien. Elle est source de pouvoir mais aussi de grands devoirs et je tâcherai de me montrer digne des bienfaits dont elle m’honore. Je ne sais si je reviendrai dans le monde ou si je demeurerai pour toujours en cet asile lointain. Mais vous serez toujours le bienvenu dans mon domaine. Jamais je ne pourrai assez vous remercier de m’avoir offert cette destinée hors du commun et cette charge qui désormais pèse sur mes épaules.

Elle préleva sur le sol quelques pièces d’or, quelques pierres précieuses parmi celles qui gisaient éparses sur le pavé. Une fortune à vrai dire, dont elle remplit une grande bourse de cuir.

Puis elle remonta dans la salle de l’Audience. Elle s’était assise sur le trône qui occupait le fond de la salle. Elle avait convoqué tous ses sujets, cette petite troupe de fidèles compagnons : Grognar, la Velue et l’elfe qui avait servi de cocher à l’attelage aérien du géant.

Lulyane régnait désormais sur un petit monde qui n’était qu’à elle et qu’elle pourrait façonner à sa guise.

Elle était devenue une véritable Comtesse et il était temps de faire prospérer ses terres. A la Velue, elle octroya le titre d’Intendante car elle avait pu constater son efficacité à la seconder. A l’elfe Mélandriel, elle demanda s’il désirait rester à son service et il répondit par l’affirmative, fasciné par son charisme et par la grâce qui émanait d’elle et il devint ainsi son Connétable, le chef de ses écuries futures. A Grognar, elle sollicita qu’il accepte de demeurer le gardien de l’Opaline, cette tâche dont il s’était si bien acquitté depuis si longtemps, ce que le géant n’imagina pas une seconde refuser, tant cette terre était devenue la sienne.

Tous lui rendirent hommage avec solennité, jurant de la servir fidèlement jusqu’à leur dernier souffle.

- Ma chère, je vais vous confier votre première mission. Mélandriel vous servira de cocher. Prenez cette bourse et soyez prodigue. Tout d’abord, je vous demanderai de rejoindre la Corporation des Arcanes pour rembourser la dette que j’y ai contracté pour acheter des griffons. Ensuite, rendez-vous dans mon ancien village en Naxopole, au pied des montagnes. Je n’y ai plus de famille mais beaucoup des paysans qui vivent là-bas sont ceux avec qui j’ai grandi. Nous aurons besoin de fermiers, d’éleveurs, d’artisans… Nous construirons dans la vallée un bourg qui permettra de subvenir à tous nos besoins et une main-d’œuvre qualifiée nous est indispensable. Corrompez les sujets de Magnus, videz ses terres de toute sa population en leur proposant suffisamment d’or pour qu’ils ne refusent pas de nous rejoindre. J’ai longtemps décimé ceux qui étaient à son service, c’est désormais son fief que je veux rendre exsangue et dépeuplé.

La Velue saisit la bourse en s’inclinant respectueusement et quitta la pièce en entraînant à sa suite l’elfe. Elle partit immédiatement sur le dos d’un griffon que menait Mélandriel pour obéir aux ordres.

Il ne restait plus face au trône que Grognar, affichant un air dépité et triste.

- Allons, Grognar, quelle est cette mine défaite ?

- C’est que… Je l’aimais bien moi ma vallée sans personne pour me marcher sur les arpions. Je sais pas trop si c’est une bonne idée de faire venir du monde…

- Nous entrons dans une nouvelle ère, mon bon ami ! Il nous faut coloniser ce sol vierge et fertile. L’ Opaline revit et nous rendrons mon domaine florissant. Nous construirons ici une île de paix et de prospérité. Un asile pour tous ceux qui auront à cœur de trouver un lieu abrité de la folie des hommes.

- Mouais, grogna le géant. Ben, je suis pas près de quitter mon rocher ! Parce que faire venir ici des p’tites têtes, c’est surtout un coup à s’attirer des emmerdes…

Il haussa les épaules et quitta la salle de l’audience avec sa tête des mauvais jours.

La mission de la Velue

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Auparavant

Quand l’oreilles-en-pointes s’est posé juste derrière moi, j’ai failli lui mettre une mandale.

Comme ça, par réflexe !

Parce que le flap-flap des ailes de son cheval à plumes m’a surpris par son bruit et par le vent sur mon crâne. Ça m’a fait un courant d’air sur "l’os-qui-pue".

M’enfin, bon, me suis retenu et l’autre est parti en courant dans la Tour sans enlever son chapeau. Je sais pas ce qu’il a dit à la patronne mais elle a fait fissa pour sortir derrière ses miches. Elle était sur son Iltarn que j’avais pas eu le temps de cligner des yeux.

Elle m’énerve quand elle fait ça ! Elle va trop vite pour que j’aie le temps de la voir. Alors, un coup elle est devant moi et le temps que je finisse ma phrase, elle est à l’autre bout de la pièce. Et à chaque fois, ça la fait rigoler. Heureusement que j’ai de l’humour et le sens de la "fière-archive" parce que sinon, quand on se fout de ma gueule, ça me chatouille l’agacement et je disperse.

- Magnus fait des siennes, il va falloir que je le calme ! Je te confie la Tour, Grognar !

Le Iltarn est monté en l’air et pfuittttttttt ! Partie !

C’est des bêtes qui marchent à l’énergie magique qu’on m’a expliqué. Et comme la patronne en est bourrée et que la Tour en jette plein autour d’elle, la bestiole est partie à la vitesse d’une flèche au galop.

Elle me confie la Tour, elle me confie la Tour ! Évidemment, c’est mon boulot !

Sauf que si j’ai bien entendu ce qu’elle a dit, elle file tête la première vers cet empaffé de Magnus. Elle a pas froid aux yeux, la gamine ! Sauf que j’ai bien peur que l’autre gugusse en ferraille lui fasse pas de cadeau. Il a déjà raccourci mon ancien patron, c’est pas les beaux yeux de la petite qui vont "l’émouvir".

A mon avis, les deux-trois petites étincelles qu’elle peut faire avec ses doigts vont pas suffire et je crois pas que je serais de trop.

Juste avant qu’oreilles-en-pointes remonte sur son canasson des nuages, je lui explique mon plan.

Il va m’aider à installer cette foutue nacelle et il va me conduire sur les lieux de la discussion. Parce que je me suis promis de le désosser moi-même le chevalier. Même que "l’Air-de-Rien" m’avait proposé son aide.

Eh, mais… Pas con, ça !

Même si je suis pas un poussin du jour, les troupes en carapace risque de me donner du fil à mordre… Un p’tit coup de main serait pas de refus. Et pis, question coup d’main, l’encapé, il s’y entend. Je l’ai vu torcher deux-trois gugusses avec la classe des "Monsieurs". On peut dire qu’il a le sens de la baffe !

- Changement de programme, "l’effe" ! On va à la Capitale ! J’ai un pote à récupérer avant d’attaquer la rigolade.

C’est pas de bon cœur que je suis monté dans le panier d’osier. La balade au milieu des oiseaux, je m’en serais bien passé. Mais bon, le chauffeur connaît le chemin… Cette fois, j’aurai pas besoin d’ouvrir les yeux avant d’avoir rejoint le plancher des poules.


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