Mogoth parut satisfait de l'accord de Xéénothée. L'Infernal accompagna l'Etranger à la porte et lui rappela que l'anonymat était primordial, du moins pour l'instant. Il voulait des renseignements sur Adalemos et la Province qu'il dirigeait. Xéénothée allait devoir reprendre son véritable aspect pour espérer pouvoir s'introduire parmi les infernaux.
- Veillez bien sur ma monture pendant mon absence. Cette fois, je n'en aurai pas besoin.
Le seigneur tout de vert vêtu exécuta des gestes complexes, et incanta des paroles plus sacrées que les dieux eux-mêmes. Le Sanglant fut aveuglé par une lumière soudaine et intense qui illumina la pièce entière, pendant qu'au centre de la sphère de lumière le corps de l'Etranger se fendillait, laissant comme des fumeroles de soleil s'échapper des fentes qui se multipliaient. Le seigneur Xéénothée s'étira, atteignant rapidement les trois mètres et demi, puis deux nouveaux bras musclés jaillirent derrière les premiers, qui s'étaient rafermis. Deux ailes de célestial noires comme l'ébène jaillirent de son dos, tandis que sa peau virait du blanc au gris cendre. Puis la lumière disparut, laissant place à un être dévêtu et monstrueux, géant, puissant et sûr de lui. Sa voix était terrible et les vibrations atteignirent le plus profond de l'esprit de Mogoth.
- Le corps humain m'engourdit, je le crains. Je suis d'habitude bien plus rapide à le mutation.
L'Etranger éclata d'un rire faisant tout ressentir, dans une moindre mesure, mais assez pour être une expérience traumatisante, à ceux qui l'entendirent.
- Vous avez bien fait d'accepter notre marché, sire Mogoth. Parlez de ce que vous venez de voir à quelqu'un et je vous envois dès mon retour rejoindre votre maître, pour que vous lui fassiez part de la perte de votre enveloppe charnelle. Taisez-vous et je me contenterai de vous aider. Maintenant, j'ai à faire en Argostole.
Ce n'est que quand Xéénothée se baissa pour ramasser ses vêtements d'humain que le Sanglant remarqua ses yeux. Et quel regard ! Mieux valait ne pas trop le croiser, comprit-il instantanément. L'Etranger se détourna et sortit du bureau, se baissant et passant sur le côté pour traverser l'embrasure de la porte. Il jaillit du castel par une des fenêtres sans se soucier de l'ouvrir et s'éleva rapidement dans les cieux, observant les terres qui s'étendaient sous lui. Puis il vit un dragon au loin. Varatorn. Décidé à échapper à ce gêneur, l'Etranger monta encore plus vers les étoiles, et fila vers le sud, vers Argostole, battant de ses gigantesques ailes.