En le soutenant doucement par les épaules, le vampire aida l’explorateur à se relever. Il y avait dans son regard perdu toute la stupeur et la panique que la situation lui faisait éprouver. Il réajusta ses binocles sur son nez et regardait bouche bée tout autour de lui. Ce vampire, ces géants, cette Tour brillante et mystérieuse… Tout ce qu’il voyait aiguisait son appétit curieux.

- Alors, qu’est-ce que je fais, Patron ? Je l’éparpille ? Ou je l’éparpille pas ?

Le vampire eut un sourire amusé mais calma néanmoins les ardeurs de son subordonné :

- Voyons, nous sommes des gens civilisés… Ce monsieur est mon invité ! Tu peux disposer, Grognar. Vaque à tes occupations…

Le géant s’éloigna, haussant les épaules et marmonnant :

- "Cilivisé", peut-être ! Mais qu’est-ce qu’on s’ennuie ! Va pas me dire, quand même… Un petit dépeçage, ça nous aurait pas fait de mal… Et pis, ça aurait amusé le gamin.

Il rejoignit le groupe de géants, maintenant amassés qui regardaient la scène sans avoir l’air de la comprendre. Parmi eux, un monstrueux enfant au visage de poupon, au regard de bambin mesurait déjà plus d’une toise et demie.

- Je sers vraiment à rien, moi, dans cette turne. Jamais personne et quand y’a quelqu’un, c’est un invité… Je vais m'amoindrir à force… Il verra quand je serai même plus capable de mettre une taloche…

Le vampire enroula son bras autour des épaules de son hôte et l’entraîna à pas lents vers la Tour.

- Pardonnez son zèle, je vous prie. Grognar est un homme d’action et souffre d’inactivité. Nous recevons si peu…

- Je m’appelle Helbin Falamur, dit l’homme sans détacher ses yeux de la splendide construction. En quoi est-elle faite ?

- Vous le voyez aussi bien que moi, éluda le vampire. Mon cher, je comprends votre admiration pour cet ouvrage et croyez bien qu’elle redoublera quand vous en connaîtrez les secrets. Enfin, ceux que j’ai moi-même découverts. Car la Tour me cache encore bien des choses.

Ils étaient désormais au pied de l’édifice, devant une large porte de bois à doubles battants à la forme d’une ogive. Helbin se sentait plus excité que jamais à l’idée de pénétrer à l’intérieur.

- Comment… ? Vous n’êtes pas le concepteur de…

- Je n’en suis que l’actuel propriétaire ! Ou le contraire ! Cette Tour et moi sommes si liés que j’oublie parfois lequel de nous deux est possesseur de l’autre.

Ils entrèrent et se retrouvèrent dans une très vaste salle voûtée en ogive, claire et lumineuse malgré l’absence de fenêtres. La lumière, comme à l’extérieur provenait de la pierre elle-même.

Deux rangées de trois énormes piliers divisaient la pièce en une large nef bordée de deux travées, le long desquelles couraient des banquettes de pierres taillées. Les longs bancs s’interrompaient par des ouvertures en arceau à intervalles réguliers qui donnaient sur d’autres salles.

Au fond de la nef qui se terminait en exèdre, un trône fait du même minéral luminescent était incrusté dans le mur. De chaque côté, dans les travées latérales, une ouverture sans porte laissait apercevoir un escalier à vis.

- Voici ma Salle d’audience, sourit le vampire. Cocasse lorsque l’on sait que je n’ai ni sujets, ni contacts avec le reste du monde. Je suppose qu’elle servait il y a fort longtemps…

- Depuis quand… ?

- … est-ce que je vis ici ? Depuis plusieurs siècles… Quatre ou cinq, je crois ! Mais ce palais m’a précédé de beaucoup. J’ai estimé son âge à près de deux millénaires.

Parvenu à l’un des escaliers, le vampire s’effaça et eut un geste élégant pour inviter Falamur à le précéder.

- Si vous voulez bien monter jusqu’à mon étage privé, je serai très honoré de partager un repas en votre compagnie. Ou plutôt de vous regarder manger…

Helbin Falamur avait oublié sa peur des premiers instants. C’est la soif de connaissance qui dominait chez lui désormais. Ce vampire ne semblait pas en vouloir à sa vie, se montrait courtois et accueillant et il allait pouvoir répondre à la foule de questions qui taraudaient l’explorateur.

Sans aucune hésitation, Helbin gravit les premières marches.

Helbin avait pris place sur une chaise de bois précieux, finement ouvragée, aux pieds en torsades et à l’assise de velours.

Face à lui, sur la grande table décorée de marqueterie, des victuailles à profusion débordaient des saladiers, des plateaux. Une table de roi ! Quand il avait pénétré dans la salle à manger, tous les plats étaient déjà disposés, son couvert était mis et des carafes de cristal faisaient miroiter l’éclat rubis de vins capiteux.

Nulle part, l’explorateur n’avait vu de traces de domestiques qui occuperaient ces lieux, et quand bien même en aurait-il croisés qu’ils n’auraient pas eu le temps matériel de préparer et servir un tel festin, une telle abondance de mets en tous genres.

La magie régnait ici, à n’en pas douter. Une magie puissante, mystérieuse…

Le vampire s’assit en face de lui, à l’autre bout de l’immense table. Sa place ne comportait aucun plat, ni aucun accessoire pour manger ou boire. Il se tourna vers la grande cheminée où subsistaient quelques bûches inentamées. Il eut un claquement de doigts et un feu s’alluma, gagnant rapidement les rondins de bois.

- Apprenez m’en plus sur cette Tour ! Je suis avide d’en connaître tous les secrets.

- Je vous l’ai déjà dit, je ne les connais pas tous moi-même. Et puis, vous aurez tout le temps de les découvrir. Au fil des années…

- Que voulez-vous dire ? Que je pourrai revenir quand je le désire ? Que j’aurai table ouverte chez vous ?

Le visage du vampire se fit moins plaisant et il eut un petit rire, presque mauvais.

- Ce n’est pas du tout ce que je veux dire… Pour la table, ne vous en faites pas. Je vous assurerai le gîte et le couvert aussi longtemps que vous respirerez. Vous ne manquerez de rien, dussiez-vous vivre cent ans.

- Je… Je suis votre prisonnier, c’est ça ?

- Quel vilain mot ! Vous êtes mon invité ! Vous pourrez aller et venir dans toute la vallée si vous le souhaitez. Mais n’essayez pas de la quitter, Grognar aura l’instruction de vous en empêcher. Et vous avez pu voir comme il met du cœur à sa mission.

Malgré l’opulence et la faim qui le tenaillait, Helbin ne touchait à aucune des viandes rôties, des fruits mûrs à souhait, des légumes délicatement cuisinés… Il était tombé dans un piège ! Il avait eu peur de mourir pendant un bref instant puis, après avoir été rassuré, il venait de comprendre qu’il risquait fort de finir ses jours ici. Ce serait peut-être plus long qu’il ne l’avait craint, mais l’issue semblait toute tracée.

- Vous comprendrez facilement que je ne peux pas prendre le risque de vous laisser rejoindre l’Empire. Nous vivons en paix ici depuis des décennies, des siècles. Ce lieu renferme une puissance considérable et nos contemporains, malheureusement, sont avides de pouvoir… Je ne veux pas voir débarquer sur mes terres paisibles des armées de conquérants cupides !

Helbin n’essaya pas de parlementer, il savait que ce serait vain. Son hôte ne le laisserait jamais fuir et il allait devoir réfléchir à un plan d’évasion. Il se servit un gobelet de vin qu’il commença de boire à lentes gorgées, plongés dans ses réflexions.

- Très bien, je vous laisse accepter l’idée d’être désormais un habitant de la Tour Opaline. Buvez, mangez, régalez-vous ! Vous n’aurez guère d’autres choses à faire ici.

En un éclair, le vampire avait disparu et la chaise vide était revenue à sa place. Helbin restait seul dans la grande pièce, son visage rendu orangé par le reflet des flammes qui dévoraient lentement les bûches dans la grande cheminée.

Dix-sept années !

Dix-sept longues et interminables années s’étaient écoulées depuis son arrivée à la Tour. Helbin avait pris de l’âge, bien sûr, mais plus encore par la souffrance de l’enfermement que par la course inévitable du temps.

Ses cheveux avaient blanchis, ses traits s’étaient tirés, son visage ridé et son corps s’était alourdi, empâté par les gras et copieux repas auxquels il s’adonnait.

Le vampire n’avait pas menti, jamais il ne manquait de rien et ces festins constituaient ses seuls loisirs dans ce monde reculé et désert où il ne pouvait jouir que de la présence d’une faune riche et nombreuse.

Mais même ces agapes perpétuelles l’ennuyaient désormais, saturé qu’il était de plats opulents.

La compagnie lui manquait, une compagnie digne de son entendement. Avec le groupe de géants, ils n’avaient que de lointains rapports. Certains d’entre eux ne parlaient pas du tout, d’autres très mal. Seul leur chef, le dénommé Grognar présentait un vague aspect humain. A vrai dire, il avait même tout du brave type, malgré son caractère bourru et râleur.

Helbin et lui se divertirent parfois ensemble dans de longues promenades, des parties de chasse ou de pêche… En fait, dès qu’il bougeait quelque part dans la vallée, Grognar, consciencieux dans sa tâche, le suivait à la trace pour éviter sa fuite. Ils convinrent ensemble qu’il serait bien plus simple et plus convivial que le géant l’accompagna ouvertement dans ses excursions.

Son hôte, il ne le voyait pour ainsi dire jamais. Tout juste en apercevait-il l’ombre de temps à autre et rarement, trois ou quatre fois peut-être depuis le début de son séjour, il venait converser avec lui.

Ses rencontres rarissimes étaient précieuses à Helbin qui, avec son appétit de connaissances, savourait chaque phrase de la conversation. Le vampire était un érudit, un grand sage qui avait beaucoup lu et il n’était pas avare de confidences sur les pouvoirs de la Tour.

Sa philosophie était pacifiste, tournée vers la méditation solitaire, le recueillement personnel… On aurait même pu dire de lui qu’il était un humaniste.

Une question hantait Helbin Falamur : où pouvait-il se retirer durant ses longues journées ? Et pourquoi ne le voyait-il parfois plus du tout pendant des semaines voire des mois ? Comme il s’ouvrait de son interrogation auprès de lui, le vampire lui répondit avec un sourire :

- Je voyage, cher ami ! Mon temps sur cette terre s’achève, du moins sous la forme qui est la mienne. Je désire accéder à un autre plan de pensée, de connaissance… Mais avant de me retirer, je dois trouver un successeur pour continuer d’insuffler la vie à cette Tour.

La vie ! Insuffler la vie à la Tour ! Était-il possible qu’un édifice fût vivant ? Le vampire lui avait déjà confié que son cœur battait dans les entrailles du bâtiment, et que par lui, la Tour respirait, existait et donnait libre cours à son pouvoir.

- La Tour Opaline est source de mana… Une prodigieuse et inextinguible réserve qui ne fait qu’un avec son possesseur par l’intermédiaire de son cœur. C’est une merveilleuse symbiose : elle vit tant que je vis et s’éteindra avec moi. Or, je n’ai pas l’intention de mourir complètement ! Seulement encore un peu plus que je ne le suis déjà. Mais pour accomplir ma destinée, il me faut disparaître… En partie…

- C’est pourquoi vous parcourez l’Empire à la recherche de votre successeur ?

- Je ne cherche plus ! J’ai trouvé celle qui semble digne de fusionner avec la Tour. Une âme pacifique, intelligente et qui, sans le savoir, est douée de pouvoirs importants. La magie inonde son corps sans qu’elle s’en soit jamais aperçue… Bientôt, mon cher, ma sinistre figure sera remplacée par le délicieux minois de mon héritière. Sa compagnie vous sera certainement bien plus agréable car elle est d’une beauté époustouflante. Mais il me reste encore quelques détails à régler. Et notamment, mettre fin à ses jours…

Mais Helbin n’avait aucune intention de rencontrer la future propriétaire des lieux. Demain, il mettrait son plan à exécution. Un plan d’évasion qu’il mûrissait depuis maintenant dix-sept ans.

Dix-sept longues années !

Tout ce temps lui avait surtout servi à gagner la confiance de son gardien. Il avait développé avec Grognar une relation presque amicale, appuyée sur leurs longues promenades dans la vallée, des discussions où ils s’ouvraient l’un à l’autre. Enfin… Où lui s’ouvrait à son geôlier.

Car le géant était sobre en confidences et en palabres de toutes sortes. Jamais il ne parlait de lui et encore moins de ce qu’il pouvait ressentir. Et pourtant, Helbin avait fini par le comprendre, il se passait beaucoup de choses dans cette grosse tête apparemment plus conçue pour impressionner ses interlocuteurs que pour se livrer à l’introspection.

Mais au-delà de son apparence frustre, Grognar était un individu vivant et pensant, capable d’émotions diverses.

Au fil du temps, en filigrane dans ses propos, Helbin Falamur avait compris que son compagnon forcé souffrait d’une situation ambivalente. A la fois, il n’aurait abandonné pour rien au monde la délicieuse tranquillité qu’il trouvait ici, épargné de la cacophonie du monde et de la fréquentation de ses turbulents habitants, et à la fois, il pâtissait d’une certaine solitude et d’un profond ennui.

Même s’il s’était attaché à ce seul partenaire de son emprisonnement, Helbin n’avait pourtant aucun scrupule à souhaiter lui fausser compagnie.

Patiemment, jour après jour, il avait emporté depuis la Tour le nécessaire à sa survie en montagne.

Ayant un jour trouvé une souche creuse, suffisamment cachée pour qu’on ne la vît pas et suffisamment grande pour contenir un nécessairement lourd équipement, il y avait entreposé, petit à petit, quantité d’objets qu’il avait réussi à chaparder.

Et désormais, sa cachette contenait tout de dont il avait besoin pour franchir les montagnes, dans le sens inverse de son arrivée, et rejoindre Samothrace.

Ce jour-là, il se régala avec le géant d’un délicieux repas, copieux et riche, constitué de gros poissons grillés qu’ils avaient pêchés ensemble, de juteux fruits qu’ils avaient cueillis côte à côte.

Et comme à chaque fois qu’ils pique-niquaient ainsi, ils s’abandonnèrent ensuite à la douceur d’une sieste réparatrice dans l’herbe moelleuse de la rive, sous l’ombre bienveillante d’un saule pleureur.

Des dizaines de fois, ils avaient ainsi dormi côte à côte avant de rejoindre la Tour et Grognar, pas plus aujourd’hui que les autres jours, n’avait de raison de se méfier.

Sauf que cette fois-ci, l’explorateur fit semblant de s’endormir. Et bientôt, quand il fut certain que le géant était plongé dans un sommeil profond, il se leva dans le plus parfait silence et fila discrètement vers la souche creuse.

Il emplit un sac de tout son matériel : couvertures, vêtements chauds, piolets, nécessaire à faire du feu,… Il le jeta par-dessus son épaule et commença de s’éloigner vers le torrent qui descendait de la montagne, à l’endroit où il avait découvert la vallée dix-sept ans plus tôt.

Pendant les centaines de toises qu’il parcourut, il ne s’inquiéta pas une seule fois du réveil de Grognar. Ses ronflements tonitruants résonnaient en écho dans toute la vallée et s’entendaient même par-dessus le tumulte de la cascade, témoignant que le gardien de la Tour Opaline dormait toujours du repos profond de celui qui est en confiance.

Helbin escalada l’éminence qui dominait la vallée mystérieuse et parvint bientôt sur les pentes escarpées des montagnes. Une dernière fois, il regarda le décor qui avait été le sien, par force, pendant toutes ces années.

Puis, sans nostalgie, il emprunta le sentier qui l’éloignait enfin de sa prison. Il éprouvait un sentiment d’immense soulagement, de liberté retrouvée. Il lui sembla qu’il avait des ailes. La difficulté du trajet qui l’attendait ne le rebutait pas tant il savait que ce dur chemin allait le conduire à retrouver le monde, à reprendre sa vie.

Un instant, il s’arrêta et tendit l’oreille. Il lui sembla… Il lui sembla… Que les ronflements avaient cessé !

Non, certainement, il était trop loin désormais pour les percevoir et puis, même si Grognar s’était réveillé, il perdrait du temps à le chercher dans la forêt, sans penser à sa fuite. Un temps bien suffisant pour qu’Helbin soit loin.

Très loin !

Trop loin !

L’ombre martiale et austère de Fort Le Cor se découpait sur le ciel gris et les nuages lourds et noirs.

Les deux soldats faisaient leur ronde au pied du rocher qui portait la citadelle, comme l’exigeait la consigne. Quelle plaie, cette consigne ! Depuis des années, on n’avait plus vu aucun danger rôder dans ces rocailles, à tel point qu’on pouvait se demander encore l’utilité de préserver une garnison ici.

Et pourtant, leur officier insistait chaque jour pour qu’une patrouille de deux éclaireurs sillonne les alentours à la recherche d’un indice d’invasion.

Un indice d’invasion ! Quelle blague !

Le jour où une invasion aurait lieu, elle ne s’annoncerait certainement pas. Un matin, on trouverait une troupe au pied des murs, installée pour un long siège ou affairée par les préparatifs d’un assaut.

Mais puisqu’il fallait bien s’acquitter de cette obligation, puisque la vie d’un soldat consiste à obéir aux ordres, les deux soldats tournaient mollement sur les sentiers escarpés. Sans réfléchir à la futilité de leur mission. "Réfléchir, c’est déjà désobéir!" leur serinaient leurs officiers depuis qu’ils avaient signés pour entrer dans l’armée.

Et puis l’un d’eux, à son grand étonnement aperçut derrière un rocher une forme étrange. Ils s’approchèrent et distinguèrent très nettement deux jambes d’hommes allongées qui dépassaient.

Ils firent le tour du rocher et tout le corps de l’individu s’offrit à leurs regards.

C’était le cadavre d’un homme. A ses côtés, un grand sac qui s’était ouvert en tombant laissait glisser des couvertures et du matériel divers. Un petit carnet dépassait de la poche de l’inconnu.

L’un des deux hommes se pencha et l’extirpa. Il l’ouvrit, pensant y trouver des informations sur l’identité de son détenteur. Il s’agissait d’un récit de voyage, inachevé, de seulement quelques pages… Une signature indiquait le nom de Helbin Falamur.

- Qu’est-ce qu’il fait là ? Et que lui est-il arrivé ? s’interrogea à haute voix un des soldats.

- Aucune idée et surtout aucune importance, dit l’autre. Si tu veux mon avis, il vaut mieux éviter de parler de notre découverte… J’ai pas envie de me taper un rapport et tout le pataquès… De toute façon, les vautours et les autres charognards vont nettoyer sa carcasse en deux jours.

- T’as raison ! Reprenons notre ronde ! acquiesça son collègue en empochant le carnet.

Avant de s’éloigner, il ne put s’empêcher de jeter un œil à la blessure mortelle. Le défunt n’en avait subi qu’une mais de taille.

En fait, tout son visage était proprement écrasé, broyé, incrusté dans sa boîte crânienne. Il s’était enfoncé d’une manière concave, comme s’il avait été frappé par une lourde boule, et des trous en divers endroits témoignaient qu’elle devait être munie de pointes.

Le soldat haussa les épaules et rejoignit son camarade qui s’éloignait déjà.