La soirée s’était avérée surprenante pour Maëlle. Kaleb Al Hassann paya le repas de la centauresse ainsi que sa propre commande. Il laissa même quelques pièces en dédommagement pour la préparation de la chambre. Le minotaure –propriétaire des lieux- ne les refusa pas, invitant même l’Ald’Rhunaise à revenir quand elle voudrait.
Et c’est escortée de De Prémont et des deux soldats qu’elle et Kaleb rejoignirent le Palais du Peuple.
Le Palais n’avait pas vraiment bonne figure : les couleurs des fresques et des peintures commençaient à s’effriter, faute d’entretien, tout comme l’état des arbres et arbustes d’ornementation. Les parterres de fleurs se faisaient allégrement envahir par les mauvaises herbes, tandis que les pelouses ressemblaient d’avantage à la jungle qu’à un terrain de polo.
Quant aux bâtiments en eux même, ce n’était guère mieux. Quelques fissures s’étiraient entre deux blocs de pierre ça et là, seules témoins du semi-abandon des lieux. Une partie du palais abritait toujours la caserne des gardes de la ville. Les gardes demeuraient un contingent d’élite et juraient fidélité absolue au palatin, lui garantissant la sécurité au sein de Méthone, pour le moins.
Il va sans dire que l‘arrivée de l’ambassadrice d’Ald’Rhune au poste de palatine en avait réjouit plus d’un. Mais la venue d’escouades des Sabres Ald’Rhunais n’était pas forcément pour leur plaire.
Le capitaine des gardes comprenait cela. Mais ses hommes n’étaient pas aussi compréhensifs.
Certains prenaient cela comme un affront fait à leur honneur de soldat…
Les Sabres, eux, n’avaient aucune antipathie pour leur collègues, au contraire. L’une des premières choses que l’on apprenait à l’académie militaire d’Ald’Rhune était le travail en équipe et la coopération. Pour eux, ils devaient protéger l’ambassadrice, point final. Dans un certain sens, les missions des deux corps étaient identiques, même si les moyens de les mener à bien différaient.
Les appartements de Maëlle avaient été préparé spécialement pour sa venue, comme l’avait annoncé l’intendant. A la place d’un lit, on avait disposé une multitude de coussins rebondis dans l’un des coins de la chambre à coucher. Un balcon donnait sur les jardins intérieurs, apportant une agréable lumière à la pièce. Des volets de bois finement sculptés permettaient de conserver la fraicheur durant les heures les plus chaudes de la journée.
Dans l’ensemble, la décoration de la chambre dénoté d’un certain goût. Les couleurs chaudes des murs, alliées aux mosaïques et aux sculptures apportaient un charme particulier. Maëlle nota par ailleurs que les tableaux accrochés aux murs représentaient des scènes incluant des centaures. Délicate attention qu’elle devait probablement à Kaleb.
Maëlle passa une nuit somptueuse. Après le voyage, court mais épuisant, le confort du palais lui fit le plus grand bien.
Elle demanda son chemin à l’un des domestiques qui vaquait à ses occupations quotidiennes, afin de se restaurer avant de commencer la journée. Elle trouva assez facilement les cuisines, où elle dégota avec l’aide d’un des marmitons deux pommes et une poire.
Ensuite, la centauresse déambula dans les couloirs à la recherche de Kaleb tout en engloutissant son petit déjeuner, pour finalement le rejoindre dans le bureau d’Hélèna. L’intendant ne s’était pas permit de s’assoir dans le fauteuil de la palatine. Il attendait patiemment, assit dans l’un des confortables fauteuil faisant face au bureau.
-Bonjour, mademoiselle, bien dormi ?
-Bonjour, Kaleb. Oui, c’était merveilleux. On entend pas du tout les bruits de la ville, c’est impressionnant !
-C’est que le palais a été conçu pour que cela ne soit pas le cas. Répondit l’intendant, plein de malice. Bien, nous allons pouvoir commencer... Ce disant, il sortit une épaisse pile de dossiers sous les yeux écarquillés de l’ald’rhunaise.
-Et tout ça, ça concerne Prévèze ?
-Oh non. Seulement Méthone et Thyde, son port…
La mâtinée passa, sans que Maëlle n’eut l’impression de rien faire. Excepté lire et remplir des papiers à la chaine...
Durant le déjeuner, qu’elle prit avec Kaleb, De Prémont et le capitaine de la Garde de Méthone, l’intendant l’informa du nombre encore impressionnant de dossiers qui l’attendait.
Le travail bureaucratique de la mâtinée ne lui avait pas vraiment plut, et à vrai dire, elle n’avait aucune envie de s’y replonger de si tôt. La centauresse décida alors de faire les choses comme elle l’entendait.
Elle exposa son avis concernant l’état de Méthone en général et émit plusieurs idées afin de rendre à la ville sa beauté et son prestige en tant que capitale provinciale.
Kaleb parut emballé, tout comme le capitaine de la Garde. Il s’avérait être natif de la ville, aussi tout travaux visant à la restaurer était pour lui le bienvenu.
De Prémont, lui, écouta avec attention sans mot dire.
C’est ainsi que Maëlle et Kaleb, escortés de deux gardes, déambulèrent dans la cité durant toute l’après midi. Ils s’arrêtaient de temps à autre, pour prendre des notes en consultant un plan de la ville.
Malgré le peu d’expérience de la centauresse, l’intendant fut impressionné par ses aptitudes naturelles à gérer les espaces. Elle dessina même un plan pour la construction d’un grand jardin publique méridional accompagné par un système hydraulique primitif à développer de manière plus approfondie.
De son côté, Kaleb lista les maitres d’œuvre et les architectes capables de réaliser ces grands projets. Méthone avait connu de grands bâtisseurs, du temps de l'Empereur Hammath. Et certains des disciples de ces anciens maitres exerçaient toujours leur art en Prévèze…
Le soir les surprit tout les deux sur la muraille sud, près de la tour de garde de Sarramot. De là, ils voyaient parfaitement la mer et le port de Thyde, plus au sud. Les soldats de l’escorte avaient suivis durant toute la journée. C’était presque un miracle, tant la chaleur, déjà difficilement supportable, devait être étouffante sous une armure. Mais les postes de garde qu'ils avaient rencontrés leur avait permit de se réapprovisionner en eau à intervalles réguliers...
Ils rentrèrent au palais, fourbus, mais heureux. Heureux d'avoir trouvé matière à changer la Méthone déclinante en grande cité digne de son rang de capitale provinciale.
C'est Jacques De Prémont qui joua un peu les troubles-fêtes:
-Et vous allez financer ces travaux comment?
Heureusement, l'intendant gardait une carte dans sa manche. A la question de l'officier d'Ald'Rhune, il l'entraina lui et Maëlle dans les caves du palais en direction de la chambre forte. Après avoir croisé un nombre impressionnant de gardes, ils arrivèrent tout trois devant une solide porte à renforts metalliques. L'intendant sortit une petite clé attachée autour de son cou à une chainette en une sorte de pendentif. Il l'utilisa dans la serrure avec précaution et ouvrit doucement la porte.
Ce qu'il y avait derrière fit tomber la remarque de De Prémont à plat. Prévèze disposait de fonds. Pas inépuisables, mais importants. Cela suffirait largement à rénover Méthone.
-C'est son excellence Hélèna qui avait ordonné une augmentation des taxes. Les fruits de cette augmentation sont ici. Avec les reliquats des taxes récoltées par les précédents palatins.
-C'est une fortune colossale!
-Certes. Et elle appartient au peuple de Prévèze...
-Maintenant que les problèmes pécuniers sont écartés, il serait peut être temps de préparer les convocations des architectes et artisants de la région. Répondit De Prémont, impassible.
-C'est très juste. Mademoiselle, notre travail n'est pas encore finit, pour ce soir...
Dernière édition par Hélèna le Jeu 27 Jan 2011 - 23:22, édité 1 fois