Le Monde de Kalamaï
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descriptionSeigneurie d'Espeyran. EmptySeigneurie d'Espeyran.

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Espeyran: Nouveau départ, émergence...

La victoire lui laissait un goût amer dans la bouche...
Ainsi, c'était tout?
Des morts, partout, mais un seulement portait le blason qu'il s'était choisi, tranché de sinople et de gueule, à la nef d'argent.
L'ennemi, pourtant en même nombre, et sûrement de même valeur, avait été pris complétement par surprise, avec cette attaque venue de nuit, par voie maritime...
Ils ne s'étaient quasiment pas défendus.

Entre les mains de Volkmar, un casque, comme les autres.
Il ne savait si le simple morceau de métal venait de ses troupes ou de l'adversaire.
Il vivait pour combattre, oui, mais pas comme ça!
Pas comme un barbare.
Prendre l'ennemi au dépourvu, s'assurer la victoire, pas une boucherie.
Pourtant, il ordonna sans hésiter le pillage des terres maintenant grandes ouvertes à leur passage, sans défenses, un pillage assurément fructueux.
Des esclaves, de l'or...
Les navires étaient profondément enfoncés dans l'eau quand ils prirent le chemin du retour, vers Espeyran.
Espeyran, la ville nouvelle.
Quelques âcres de terres côtières, quelques champs, une palissade, un certain nombre de maison, et au centre, le fort, bastion de bois sans fioritures.
Une ville récente, et encore pauvre, à peine mieux que le village de pêcheurs d'origine.
Il y en avait d'autres, sur la côte, soumis à Espeyran...
Où loger les 600 esclaves pris par la troupe, quand la population totale du domaine ne dépassait pas les 2500 âmes.
La "Garde" accueuillit le retour des soldats avec forces vivas et cris de joie... La Garde... Un ramassis de vieillards et gamins, trop vieux ou trop jeunes, des éclopés, des imbéciles, des blessés, et une demi douzaine de soldats passables. Pas mieux ni pire que la troupe.
Ils n'auraient pas arrêté une forte troupe de brigands.
Les maisons sur le quai, étaient encore presque droites, alignées, le quai était en parti de pierre, là où s'amarra la nef seigneuriale.
Mais plus loin, le ponton de bois branlant pliait sous les lourdes bottes, les maisons, vers la plaine, se ramassaient sur elles-mêmes, les rues boueuses ne méritant même pas le nom de passages, les échoppes inexistantes, des fenêtres donnant sur des murs, quand elles existaient, des taudis de pisé, de foin, de chaume, de boue...
Un champ de malades!
Les fermiers d'au delà des murs vivaient mieux, avec bien moins de risques, car la palissade clôturant le bourg n'empêchait que les poules de passer.
Seul les quelques échoppes du haut quartier, sur la colline, et le fort, avaient comme une allure...
Tout celà allait changé!
Définitivement, et complétement.
Les caisses renflouées du jeune Volkmar, pourraient bientôt servir à mieux qu'envoyer trois péquins prendre possession d'une ferme bancale.
D'abord, Volkmar se devrait de rendre visite à la Palatine d'Outre Mer, pour lui présenter ses respect et ses hommages... En parfait ignorant de la politique, il ne savait que ça, que c'était une femme... Mais il ne pouvait rester inconnu des dirigeants de la Province, quoi qu'ignorant de ses devoirs envers ceux ci.
Avec un hochement de tête approbateur et les yeux dans le vague, le guerrier de 17 ans passés sauta du pont du navire, et joignit à grandes enjambés son fidèle lieutenant, Alban le hors la loi, un grincheux de 47 ans, ni particulièrement bon combattant, ni bon commandant, ni même stratège, seulement passable comme archer, mais qui avait l'incomparable avantage d'être le seul ami du jeune homme, et sa plus vieille connaissance. Et désormais son gouverneur, en ville, quand d'aventure Volkmar partait en expédition.
De loin, rien ne distinguait réellement les deux hommes de leurs soldats, si ce n'étaient la haute stature du jeune noble, et l'âge avancé de son ami, qui avait pourtant encore fière allure.
Ils se saluèrent affectueusement, et prirent le chemin du fort, laissant un officier trié sur le volet, du moins dans la mesure du possible, assurer le déchargement.
Pour le moment, les prisonniers iraient camper hors les murs, histoire d'ajouter un peu plus à la misère du tableau..
Une idée noire qu'un verre de cervoise ne pourrait chasser, à défaut de bière, faute de houblon...

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A quelques lieues d'Espeyran. [Intermède]

La petite troupe allait de l'avant...
Une vingtaine de fantassins, en patrouille aux alentours d'Espeyran.
En attendant de pouvoir faire de sa ville une citée capable de résister aux assauts ennemis, le nouveau seigneur, Volkmar, avait organisé des tours de garde, afin de prévenir l'arrivée d'une troupe ennemie.
Mais des hommes peu aguerris, en plaine, sont bien mieux repérables qu'une horde d'animaux, dont c'est la zone de vie et de chasse.
Oh, la patrouille avait aussi pour ordre de ramener ce qu'elle pourrait de nourriture, vu les ennuis d'approvisionnement du bourg.
Mais ils n'avaient jamais été préparés à affronter un gibier qui les prendrait pour proies.
Aux alentours de midi, montant le camp, ils aperçurent quelques frémissements, dans un buisson, à une centaine de mètres de leur feu, et estimèrent que seul un blaireau pouvait les déranger ainsi.
Ils prirent donc le temps de préparer leur tambouille, la manger, et même se déchausser... puis de prendre une pause, une petite sieste.
Le domaine était trop faible, trop petit pour intéresser qui que ce soit.
Et ses cibles trop vulnérables pour savoir se venger.
Ainsi, abandonnés par le simple bon sens, et dédaignant les précautions les plus élémentaires, nombreux ne virent jamais la bête qui leur sauta dessus, à l'improviste, menant sa horde derrière elle, et arracha la tête des dormeurs aussi sûrement qu'on rompt le pain.
Quand à ceux qui purent tenter de se défendre, il faut espérer que la mort de deux bêtes, suffise à appaiser leur conscience, et donner un sens à leur sacrifice, de toute façon inévitable, l'adversaire courait trop vite...

_______________
Lorsque la patrouille fut déclarée inexorablement perdue, le jeune Volkmar ne sut comment réagir.
Désertion?
Attaque?
Lorsque, dix jours plus tard, une autre patrouille disparut, et qu'on retrouva par la suite leurs restes éparpillés sur plusieurs lieues, le jeune homme dut se résoudre à l'évidence. Au delà de ses murs, la campagne était manifestement dangereuse et hostile à l'homme.
Alors aboutit-on à l'entraînement d'un corps d'élite, spécialisé dans le combat, mais surtout la traque et l'exécution des créatures sauvages...
Ou encore dans l'optique de servir de garde rapprochée...

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Espeyran. Sang et Cendres. Premier jour.

Les trompes sonnèrent, dans le froid de la matinée.
Les brumes recouvraient encore le petit port.
Les patrouilles étaient rentrées depuis longtemps, les gardes sur les murs tombaient de fatigue, attendant la relève.
Dans le bourg, rien ne bougeait.
Jusqu'à la sonnerie des trompes, justement.
Dans la tour centrale du petit fort surplombant les masures assemblées entre les murs, Alban sauta de son lit de camp, et se renversa le bol d'eau qu'il gardait toujours à côté de lui sur la tête.
Il avait toujours du mal à se lever, le matin, et le bol n'était là que pour le réveiller.
Une précaution issue de ses années de brigandage.
Il enfila sa tunique cousue de maille, sa barbute, qu'il trainait depuis des dizaines d'années, et des chausses, avant de sauter dans sa père de bottes, et de prendre une dague longue et son arc.
La chambre était pour lui seul, et il avait refusé que quiconque d'autre ait le droit d'y entrer. Ainsi, il aurait pu disposer d'un serviteur pour l'aider, avec ses rhumatismes, quelqu'un aurait pu faire le ménage à sa place.
Mais il s'était obstiné. Il avait assez souffert, pour disposer d'un espace à lui, à lui seul!
Même à Volkmar, il en interdisait l'entrée, et les Dieux seuls savaient ce qu'il lui passait, à ce garnement.
Le vieil homme descendit les marches quatre à quatre, sortit dans la petite cours, et rejoignit le lieutenant à qui il avait confié la Garde...

"Lieutenant, rapport!"

L'homme se retourna d'un bloc, salua.

"Nous sommes attaqué M'sire..."

"Je m'en doute bien, sombre crétin! La situation, voilà ce que je veux!"

Le jeune lieutenant serra les dents, le poing. Si encore on lui avait laissé le temps d'y venir.
Mais si personne n'aimait Alban, on devait bien le supporter, il était sous la protection du gamin.
Encore qu'une flèche perdue pouvait très bien le surprendre, lors d'une bataille.
Il adressa une prière rapide en ce sens, sachant très bien qu'il n'oserait jamais le demander à un archer... Et répondit précipitement.

"De ce que nous savons, l'ennemi nous a pris par surprise, ils sont déjà dans le bourg."

L'ancien bandit proféra un chapelet d'injures, et frappa la palissade de bois, d'un poing rageur.

"Qui?!"

"Aucune idée, M'sire."

Alors Alban tourna les talons, vivement, et grimpa sur l'étroit chemin de ronde, marmonnant des imprécations contre les imbéciles et les incapables dont il avait la charge de sauver la peau, qui ne valait rien qu'à être trouée.
Mais là haut, il prit conscience de la situation.
Dans leur petit royaume, faiblement peuplé, pauvre, mal approvisionné...
Les soldats mourraient jeunes, des patrouilles entières tombaient face à des animaux sauvages, la troupes était composée de bleusaille sans expérience, qui se pisserait toujours dessus au premier accrochage sérieux.
Et là, c'était une armée entraînée au pillage, sans pitié, dix, vingt fois plus nombreuse qu'eux, qui leur tombait sur le râble.
Et il n'avait qu'une poignée d'hommes capables, à leur opposer, peut-être soixante, au grand maximum.

"Tous sur les murs, ramassis d'empotés, et fermez moi ces portes, bande de crevures!"

Les torches qui passaient déjà dans les rues proches du château ne pouvaient être celles de l'assaillant, quand même?
Si une partie de la populace du haut quartier avait fuit dans le fort, une bonne moitié était désormais piégée entre l'ennemi et le château, sans aucun espoir.
La foule des bas quartiers avait elle déjà subit l'impact, certains étaient morts, d'autre prisonniers, déjà.
Les plus malins avaient pu fuir, pour le moment.
Les débris de la garde du mur, des milices communales se débandaient vers le fort, ou vers le port.
Ce seraient les seuls point de résistance. Le port était en effet enclos d'une palissade régulière et assez forte pour résister à un assaut.
Il ne fallait seulement plus espérer gagner, mais repousser l'ennemi suffisament longtemps.
Les hurlements se rapprochèrent.
Alban, qui réfléchissait, là haut, sur le mur, dans la cohue des hommes se préparant à repousser l'ennemi, se pencha par dessus le parapet.
Quelques miliciens un peu plus avisés avaient tenté de monter une barricade de bric et de broc, devant la porte, avec le vain espoir de repousser l'ennemi, de là, aidés par l'élite du royaume, à l'abris des murs.
Un espoir vain, mais toujours plus accessible que se rendre.
Un groupe d'une dizaine d'orcs surgirent d'une rue, et se rua sur la barricade.
Un seul d'entre eux y parvint, et succomba immédiatement, mais c'était déjà un coup assez impressionant, puisqu'ils s'étaient fait criblé de flèche.
Le second groupe qui surgit était plus imposant, et lui, ne se rua pas.
Ils prirent le temps de la réflexion.
Alban secoua la tête, beugla quelques ordres, et confia le mur à son lieutenant, pour rejoindre la tour-porte fortifiée.
Dans le même temps, des flammes montèrent, hautes et vives... les premiers incendies.
La journée serait longue.
Il était seulement dans la tour quand une centaine d'orcs se mirent à courir vers la barricade, en contrebas, défendue par une petite vingtaine de trouillards qui osaient à peine lever leurs armes.
Les flèches qui volèrent n'empêchèrent nullement la vague de sauvages de sauter par dessus le bric et le broc.
Le vieil homme se joignit aux autres archers, pour tirer la masse grouillante, juste devant la porte.
Un ordre avait du être donné, car une pluie de pierres plus ou moins grosses, de la taille d'un poing à celle de deux ou trois têtes assemblées, tomba sur les assaillants.
Ils s'acharnèrent malgré tout, et le son du fer frappant le bois indiqua leur intention d'enfoncer l'entrer.
Elle fit long feu.
Sous les pierres, les flèches, complétement à découvert, une dizaine d'orcs seulement rejoingnit la rue d'où ils avaient surgit.
Le reste de la journée se passa comme ça, alternance d'assaults et de répits.
Par chance, les machines de siège étaient incapables d'accéder à la butte, mais des échelles furent dressées, et repoussées.
Lorsqu'un bélier parut devant les murs, une volée de flèches enflammées mirent fin à la tentative.
Et en fond, les pillages, les viols, les massacres.
Ils n'étaient assaillis que par une bande de pillards et de ravageur un peu plus nombreuse, pas même par une armée digne de ce nom. Et ils n'y pouvaient rien.
Il y avait même de fortes chances que leurs assaillants ne soient pas que des orcs, mais soient mêlés de toutes races...
Vers treize heures, une vague prit pied sur le mur, et fit du ménage par le vide.
Le tir des archers se concentra sur cette section, et une poussée héroïque les renvoya par dessus le rebord, mais les gardes du fort se rendaient bien compte qu'ils ne tiendraient jamais.
Leurs forces s'amenuisaient en réalité même plus vite que leurs munitions.
Il fallait un miracle. Et le miracle vint.
Une heure après cette quasi-réussite, les assaults cessèrent, et l'adversaire monta son campement dans les ruines du bourg, la veille si florissant.
Les incendies duraient encore, les taudis du bas quartiers avaient pris feu comme de la paille, mes les maisons bourgeoises, si on pouvait les appeler comme ça, faisaient des brulôts bien plus conséquents, et bien plus longs.
Ce répit fut l'occasion de dénombrer les survivants, une petite trentaine, sur les soixantes soldats d'élites, et... une cinquantaine de miliciens et de conscrits, des citoyens armés de la première espèce de bout de métal qui pique ou qui tranche, qui leur était tombé sous la main.
Et aussi de voir que les murs du port tenaient toujours, mais semblaient dans un tel état, que ce n'était que provisoire.
Alban jurait, râlait, pestait, depuis le matin, mais si il s'employait en gueulant à qui mieux mieux, à maintenir ses troupes en activité pour éviter la démoralisation, il n'imaginait même pas, en lui même, l'état de leur propre mur... Il en avait bien trop peur.
Une faible tentative de prendre le fort eu lieu le soir venu, avant la nuit, mais ce fut un échec piteux, et la lune se leva sur un champ de bataille apaisé, bien qu'encore fumant, et promis à le redevenir le lendemain.
Des feux de camps avaient remplacé, dans la nuit, les lumières des bougies par les fenêtres des demeures.


__________

Espeyran. Sang et Cendres. Au matin, le lendemain.

Et la nuit passa.
A l'aube, le lendemain, une série de hurlement accueuillit le lever du soleil, et les échelles s'abattirent une nouvelle fois le long des murs.
C'était un baroud d'honneur, pour les défenseur. Leur chute était inévitable, l'ennemi ne pillait même plus, ils étaient tous là, contre leurs murs.
Un moment donné, la corde de son arc lâcha, et Alban dut sortir sa dague et rejoindre le mur, pour combattre au corps à corps... Mur où les lignes de défense craquaient. Inéxorablement. Un premier assaillant posa le pied sur le mur, puis un second...
Puis une foultitude, en de multiples points du mur.
Le vieux hors la loi esquiva une lame, et roulant sur lui même, parvint à planter l'estomac d'un énergumène malodorant.
Le temps de se relever, il se rendit compte que ses soldats lâchaient leurs armes, pour tourner les talons... vers la cour. Vers un carnage qui serait un jeu d'enfant pour les archers ennemis, une fois sur les murs....

"Ramenez vos miches bande de lopettes, ou je vous troue le cul moi-même, avant ces salopards d'enfants de salauds! Vous croyez qu'ils vous épargneront, si vous vous rendez?! Minables, raclures, bâtards de couards!"

Si ces cris et ses hurlements ne risquaient pas de les faire changer d'avis... Ben, ses propos eurent le mérite d'au moins leur faire saisir qu'ils mourraient tout autant, et peut-être avec moins de souffrance, les armes à la main que parqués dans leur propre refuge.
Du moins pour certain.
A un moment, Alban se retrouva, devant une porte d'accès à la tour-porte, au côté de son lieutenant, qui avait, depuis le matin, perdu une oreille, un doigt, et gagné pas mal de bandages.
Sans un mot, ils plantaient, paraient, esquivaient, tailladaient. Jugeant la dague trop courte et mal adaptée, le commandant de la place en l'absence de son suzerain, Volkmar, avait ramassé la rondache et l'épée d'un mort, qui n'en avait manifestement plus l'usage.
Au loin, un grand craquement retentit, sans qu'il ne puisse se rendre compte de ce dont il s'agissait.
Il espérait seulement que ce n'était pas la porte.
Une lance passa la garde du lieutenant, et l'envoya se clouer au mur, la panse transpercée de part en part.
Mais il n'y avait rien d'autre à faire que de continuer à se battre.
Et petit à petit, dans le flot de la bataille, vint le reflux. Le vieux brigands, dont la plus grande spécialité était la survie, maniait à deux mains une épée encore différente, et désormais, il pouvait reculer, si le besoin se représentait... Car l'ennemi abandonnait le mur, peu à peu.
Et ce fut terminé.
Les dernières franges de la bande de pillards détalèrent en courant, du bas du mur, suivant leurs compagnons, dont les premiers étaient déjà loin... en quête d'une autre proie.
Il n'était pas midi... Et ils n'étaient plus qu'une dizaine, sur les murs, à tenir debout.
Plus quelques archers épuisés, trois ou quatre seulement, qui sortirent de la tour...
Tout ce qu'il restait des défenseurs d'Espeyran, et ce, pour longtemps, car au loin, la raison du craquement se dévoilait, dans la fumée montant des cendres: La palissade du port, comme déchirée en deux, abattues, couvertes de cadavres, les navires brûlant encore, sur l'eau, tandis qu'ils sombraient, et les derniers râles des agonisants.
Dans la récente seigneurie d'Espeyran, en Outre Mer, tout n'était plus que Cendres et Sang...

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Espeyran: vers la richesse!

Bien des lunes avaient passé depuis cette sanglante soirée.
Les dégâts avaient été terribles.... mais il s'était avéré que bien des villageois avaient pu fuir, dans la campagne, par la mer.
En une semaine, deux semaines, ils étaient revenus, une fois la peur d'un nouveau pillage chassée.
Ils ne connaissaient rien d'autre, après tout.
Mais la misère était plus forte que jamais.
Les quartiers "riches", sous les murs de la citadelle, avaient brûlé de font en comble, le port n'existait plus, mis à part les deux trois jetées de pierre.
Du reste, les palissades n'auraient plus arrêté une chèvre, les cahutes des paysans, des pêcheurs, branlaient à chaque mouvement dans la rue.
Les rues jonchées de détritus, des chemins boueux...
On aurait vraiment pu se demander ce qu'on pouvait tirer de "ça"...
Et Volkmar était encore absent, pas revenu, pour deux sous.
Alban en ruminait sa mauvaise humeur dans la tour, beuglant des ordres débiles à des soldats désoeuvrés.
En bref, parti comme ça, on stagnait, dans le marasme, et la crise approchait, entre le mécontentement ambiant, les diverses pénuries.
Karl-Hermann Handel comptait bien être l'homme qui allait changer tout cela.
Il partait de rien, ce Karl-Hermann.
Enfin, de presque rien... Ancien prêteur sur gages, fuyard et hors la loi, le genre de type à pas se laisser embarquer par les milices d'un quelconque seigneur... Le genre de type à se moquer comme d'une guigne, des lois, et du respect des autres.
Du genre de ceux qui font fortune sans se soucier du bien fondé de leur action.
Il faut toujours profiter des opportunités.
Karl-Hermann s'était engagé, avait pris le commandement d'une patrouille, rapidement, en graissant une ou deux pattes.
Avec quelques hommes sous ses ordres, il les avait convaincus, les avait "embrigadés", et ils étaient partis en chasse.
Piller un village sans liens avec Espeyran, ramener dans la petite ville des vivres, les produits manquant en faisaient des héros.
Il n'y avait pas de richesses encore, et donc, vendre eut été une folie, mais à donner, on se forgeait une réputation.
Rapidement encore, Karl-Hermann fit l'acquisition d'un "langskip", un petit navire ponté, capable d'affronter la haute mer, une voile, des rameurs, effilé.
Un navire de combat.
Avec un équipage porté sur le banditisme, ça ne pouvait donner qu'un pirate.
Par chance, qui allait se soucier d'Espeyran?

Oh il n'en resterait pas là, mais tout d'abord, se créer des fonds propres, se rendre utile à la communauté.
En moins d'un mois, il était devenu connu, et reçu par le seigneur Volkmar, qui le remercia pour ses loyaux services, bien qu'ignorant tout de ses activités.
Au bout de quelques mois de plus, il avait deux compagnies de pillards, indépendantes de l'armée, et ne se déplaçait plus en personne, et deux navires, une maison neuve dans les quartiers de la "bourgeoisie", pour finir, un petit pécule.
Les affaires pourraient commencer.

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Tranche de vie...

Des gamins jouaient dans les rues, couraient après ce qui trainait.
Les plus âgés, dans une impasse, avec une balle de cuir crevée et dégonflée, pratiquaient un sport qui tenait plus de la castagne que du jeu de ballon.
Il suffisait que l'un d'entre eux s'en empare, pour que tous les autres, sans exceptions, lui tombent dessus, en tas, les poings serrés, dans l'unique but de récupérer la balle.
Un garçon était au sol, quelques mètres plus loin, sonné, l'arcade sourcillière vilainement ensanglanté, et un autre des participants s'était déjà esquivé avec un bras probablement fracturé.
Oh, ils n'étaient qu'une dizaine à jouer à ça, vers les quartiers du port, mais la scène était assurément marquante, patinée de rouge sang et d'un blanc cassé poussiéreux.
La rue n'était pas pavée, pas même caillassée, c'était un chemin terreux suivant la ligne d'un ruisselet boueux, dont les rives craquelées étaient échouées de fange et d'ordures de tous genres.
Sur plusieurs pâtés de maison, c'était ainsi, et encore, des maisons? Des cahutes de bois et de boue, voire de pisé, toits de chaumes moitié éparpillés par le vent.
Sur les quais de bois du port, se tenait le marché aux poissons, fumet d'entrailles de la pêche du jour, ventes à la criée, tmosphère saturée d'odeurs nauséabondes, de sons criards, les petits boutres de pêches venaient en contrebas se cogner aux piliers de bois des quais, et les derniers retardataires pestaient en cherchant un emplacement pour leurs étals.
Mêlés à tous ça, les cris des ivrognes, les odeurs d'alcool, les éclats des tavernes.
Bien plus loin, on distinguait les quais de pierre, et les navire de course du prince, fins, élancés, à l'étrave renforcée de métal, pour briser les coquilles de noix adverses.
Quelques marchands étaient là aussi à quais, haut sur les flots selon qu'ils soient vides, ou la quille invisible sous l'eau lorsqu'ils étaient sur le départ.
Au loin, une voile grandissait, porteuse d'une voile jaune, les voiles du "congglomérat Handel", qui possédait rien moins que quatre bâteaux, tous basés à Espeyran.
Dans les rues plus hautes, des quartiers d'habitations, des échoppes d'artisans, menuisiers et autres, les chemins étaient pavés cette fois, grossièrement, de caillasse, mais pavés, et les bâtisses de bon bois bien agencé.
Mais on n'égalait pas la ville haute, séparée du reste de la cité par une palissade percée de quatre portes, aux points cardinaux.
De grandes dalles d'ardoise recouvraient les rues, et se dressaient ci et là quelques maisons de pierres, des boutiques plus raffinées, et une agitation toute différente, en bruissements de textiles, en tintanibulements d'espèces sonnantes et trébuchantes, en murmurres, et négociations.
Mais la ville haute n'était pas si grande qu'on n'en eu pas fait le tour en quelques minutes, à vrai dire.
En montant sur la palissade, on pouvait voir les campagnes environnentes, et, chose intéressante, les murs de la ville, des barrières à chèvres quasiment, plus que vraies palissades, qui enclosait sans problème Espeyran en son entier, et le même espace de champs et pâtures.
Et derrière, au coeur de tout, sur la butte, la grande colline, le castel, le caer, sa première enceinte de bois, la haute cour de pierre et le donjon, de même, résonnant des cris, des ordres, du désordre ambiant, des chocs de l'acier contre l'acier, que ce fussent les bruits d'entraînement ou de forge...
Ainsi dans un coin, deux soldats, manifestement très dissamblables par l'âge, et pourtant voisin par la carrure, frappaient d'estoc et de taille, parant les coups adverses, les boucliers aussi utiles pour arrêter les lames que pour frapper l'adversaire, le fil des épées s'entrechoquaient, quelques estafilades marbraient les endroits nus de leurs corps, visages, bras; une pluie de coup tomba sur le plus jeune des deux, qui finit par tomber à terre, le bouclier fracassé, pendouillant au bout du bras insensible, l'épée à terre, sonné par un coup du plat de l'épée à la tempe..
Il s'effondra visage contre terre dans la poussière, tandis que le plus âgé, les cheveux poivres-sel déjà, se dirigeait à grands pas vers le puit, y tirer un seau d'eau qu'il se déversa directement sur la tête, avant d'en boire un second.
Malgré la vieillesse lui courant après, le vieux renard qu'était Alban était encore robuste, et surtout, suffisament malin pour savoir se battre intelligement.
Et personne ne le battait au tir à l'arc, lui mettait neuf flèches sur dix dans le coeur de la cible, et restait même précis sur un cheval au galop.
Mais si il avait suffit de ça pour faire un grand général, un bon conseiller, un officier populaire...
Mais l'ex-hors-la-loi taciturne n'avait manifestement toujours pas envie de s'offrir ce luxe, de sortir de sa misanthropie.

Sans un regard pour personne, il passa la porte du donjon...

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