Post n°1
Naissance et enfance
Zacharias Iérothéon est né dans une famille de mécènes très pieux, à Anaphe. Très jeune, il a côtoyé des ménestrels, des poètes, des peintres, des sculpteurs, des comédiens, des dramaturges, des écrivains, des savants et des philosophes, et il grandit en compagnie des favoris de ses parents, qui appréciait ce gamin plein d'énergie, toujours près à donner un coup de main ou une idée, idée que l'on ne peut trouver que dans l'esprit innocent et rêveur d'un gosse.
La religion occupa au moins autant que l'art l'enfance de Zacharias. Ses parents, bien qu'aristocrates - son père était un Sénateur puissant - étaient de très fervents républicains, et en faveur d'une démocratie utopique, comme la dictait les prêtres pouilleux de Dinas, et le collège des Jeunes Prêtres de Nimburr, très influent dans les salons et les clubs de la ville. Le jeune garçon fut donc formé aux dogmes de ces deux dieux, que ses géniteurs vénéraient tout particulièrement : l'un pour sa bonté et sa générosité, l'autre pour son intelligence et son intérêt pour toutes sortes de choses.
Les Iérothéon avait Zacharias pour fils unique, et plaçaient tous leurs espoirs en lui, se réjouissant en voyant qu'il devenait en grandissant l'enfant tant rêvé, curieux et passionné de tous les arts, bon et gentil, traitant à égalité avec tous. Il étonnait la haute société d'Anaphe par son esprit très cultivé et sa vivacité de réflexion. Il commença à apprendre le luth vers l'âge de dix ans, et se débrouilla de bien belle manière dans son apprentissage de chant. Des poètes lui apprirent à composer, et il s'en sortit bien. Mais il délaissa peu à peu les artistes visuels, se désintéressa de la peinture et de la sculpture, classiques, redondantes et trop réalistes pour démontrer de l'imagination à son goût, et se consacra à la musique, et aux études de droit que lui donnaient ses parents.
Adolescence et exil
Arrivé à l'adolescence, il commença à s'éloigner de la voie que lui avaient tracée ses parents aimant. Amoureux des langues, Zacharias cessa tout son travail de droit, et choisit d'apprendre en secret le plus de langages possibles avec les marchands du port et les marins du monde entier qui passaient par Anaphe. L'elfique, langue musicale parmi les langues musicales, ne lui posa aucun problème et devint vite sa préférée, avec le langage franc, sincère et brut des Natifs d'Outre-Mer, et il put dès lors lire les précieux livres elfiques que ses parents gardaient sans pouvoir s'en servir, et les traités passionnants sur toutes sortes de sciences que des Natifs échoués ici leur avait donnés. Il apprit les mœurs des elfes du continent et d'Outre-Mer, et s'intéressa tout particulièrement à la culture Native, qui l'intrigua énormément, par ses contrastes et sa ressemblance en même temps avec celles de l'Empire.
Puis ses parents se rendirent compte que leur fils avait quitté l'idée qu'ils s'en faisaient, et leurs espoirs de le voir un jour à la tête de Thassopole, instaurant une véritable démocratie s'effondrèrent, en voyant qu'il ne faisait plus qu'écrire, lire et jouer de son luth, où il s'avérait cependant un véritable virtuose. Et ils se lamentèrent, le sommant, le suppliant ou lui ordonnant de reprendre ses études. Mais il refusa et, las de leur gémissements constants, finit par fuguer, à quatorze ans, sans revenir pendant des années, même quand son père fut assassiné quelques temps après par ses adversaires politiques.
Il revint enfin quand le célèbre Arzhùl Gorbad arriva au pouvoir, deux ans plus tard. Sa mère accueillit froidement la nouvelle de son retour, qui faisait grand bruit dans les cercles mondains de la capitale des Îles dorées, d'autant plus qu'il ne lui rendit même pas visite. Sa douleur fut telle qu'elle hésita à mettre fin à ses jours, renonçant cependant à la pensée que son chien de fils hériterait alors de la fortune de son père, qu'il avait abandonné. Elle apprit son mariage avec la fille d'un marchand quelques mois plus tard, et ne répondit pas à l'invitation que son fils daigna lui envoyer pour l'occasion. Puis une maladie la prit et elle mourut rapidement.
C'est ainsi que Zacharias Iérothéon rentra enfin chez lui, et prit possession de la fortune parental, à dix-sept ans environ. C'est avec joie qu'il retrouva la bibliothèque et prolongea le contrat du vieil intendant, n'ayant pas la moindre envie de gérer un domaine. Il passait le plus clair de son temps avec son épouse, d'un an son aînée, les philosophes et les musiciens qu'il entretenait. Enfin, c'est ce que croyait tout le monde.
En réalité, Zacharias, sa femme et ses amis tentaient en secret de trouver un moyen de renverser Gorbad, qu'ils appelaient "le tyran", pour mettre à sa place un homme ou une femme au caractère bien trempé, et aux convictions suivant les leurs : l'anarchie pragmatique, comme ils appelaient leur régime.
Pendant son absence, le très jeune Iérothéon avait vogué jusqu'en Outre-Mer, et apprit des choses parmi les Natifs, éblouissant par son talent musical les autochtones, qui avaient fini par le considérer comme l'un des leurs, et l'avaient instruit sur leurs coutumes, leur culture, sur Synodar et les anciennes théories anarchistes. Bien vite, le jeune homme en devenir s'était rendu compte que l'anarchie n'était pas un système viable en Thassopole, voire en Kalamaï, tant que les mentalités n'auraient pas été fortement changées, mais tout son être vibrait à l'idée qu'il puisse un jour être applicable.
Il s'interrogea ensuite sur comment changer les mentalités, et en vint à envisager deux moyens : la force, par l'instauration d'un régime autocratique visant à réformer rapidement et efficacement la pensée commune par le biais d'une réclame intensive et d'une élimination des opposants, ou bien l'art, par son caractère profondément touchant. On ne pouvait se cacher de l'art : s'il vous émouvait, vous n'y pouviez rien, et vous suiviez ce que l'art vous disait.
Instaurer petit à petit l'anarchie, où chacun serait libre, mais ne porterait préjudice à personne d'autre, en passant par le pouvoir, car il n'y avait pas d'autre moyen, c'était une belle idée, plus réaliste que celle de la révolution anarchiste, que les parias de Prévèze, par exemple, semblait soutenir. Après l'Outre-Mer, Zacharias alla justement en Prévèze, et les parias le trouvèrent inanimé dans le désert, à demi-mort, pour le ramener chez eux. Ils l'interrogèrent et, après s'être assurés qu'il ne représentait pas un danger, le gardèrent parmi eux. Le Thassopolien apprit beaucoup des erreurs de ces gens, mais en vint à les considérer quand même comme des amis, et c'est avec regret qu'il s'échappa pour rejoindre Zakinthe, et de là Gargath, pour rentrer en Thassopole.
Retour à Anaphe
Quelle ne fut pas sa surprise d'y voir la République bafouée, un fanatique religieux à sa tête ! Zacharias Iérothéon fit savoir son retour, puis s'enquit auprès de ses nombreuses anciennes connaissances des nouvelles des trois dernières années. Ainsi, son père avait été tué. Zacharias en avait été fort attristé, et il eut peur de retourner voir sa mère, après tant de temps d'absence, et après le déshonneur dont il s'était souillé en ne portant pas le deuil de son père. Mais qu'importait, il était mort désormais, et il fallait se recentrer sur le présent.
Sa mère l'ignora royalement, et Iérothéon réussit à obtenir le gîte et le couvert chez un ami de son défunt père, qui dirigeait la capitainerie du grand port, grâce à son talent. C'est à l'une des fêtes qu'il organisait qu'il rencontra Jern, sublime dans sa simplicité, impressionnante dans sa culture et son savoir : son père marchand avait parcouru tant des terres qu'elle avait profité d'un peu de tous les savoirs du monde. Elle fascina immédiatement Zacharias, et celui-ci la fascina de même. Aussi n'attendirent-ils pas pour s'unir, avec la bénédiction du père, heureux que sa fille ait trouvé un aussi bon parti.
Puis la mère de Zacharias succomba à une maladie fulgurante, et le jeune homme revint avec sa nouvelle femme dans sa demeure, pour fomenter la chute du régime Gorbad. Mais ce dernier finit, au bout de quelque temps, par être informé des manigances du jeune noble, et le fit arrêter, lui, sa femme et ses complices, confisqua toute sa bibliothèque et tous ses biens en général, et le livra à la merci de ses sbires de l'Ordo Repurgatoris. Mais Zacharias s'évada des geôles, et assista sans pouvoir rien faire à la torture, puis au meurtre de Jern et ses amis. En une nuit, il avait tout perdu.
Nouvel exil
Il se réfugia chez de pauvres amis, sur les docks, et réussit à prendre un cargo à destination de l'Outre-Mer, où il demeura quelques années encore, apprenant la lutherie en ruminant sa vengeance, sa haine contre le pouvoir. Le pouvoir politique d'une part, et le pouvoir divin d'autre part. Il prit en grippe les dieux et les dirigeants humains, tout en créant un nouvel instrument, à l'image de sa rancœur : simple et puissant.
Pris sur le modèle du luth, il aplatit la caisse de résonance, la façonna en cèdre au lieu de l'épicéa, et remplaça la rosace par un simple trou. Sur le manche, il plaça des petites barres, pour rendre l'instrument plus mélodique, et parvint à trouver un procéder pour créer des cordes en acier, qu'il fixa au nombre de six sur son instrument. Il fit le manche moins large que celui du luth, mais plus long, et la table d'harmonie plus petite.
Un nouveau départ
Il appela son instrument la guitare, s'étant inspiré, en plus du luth impériale, de la cithare Outrîlienne, et commença à exploiter ses nouvelles possibilités, démontrant une nouvelle fois sa virtuosité exceptionnelle. Puis il repartit pour l'Empire, à l'aube du conflit Outrîlien contre les Pirates. En quelques mois de vagabondage, il fut à la Cité Impériale. A peine eut-il franchi la porte de la ville qu'il perçut une rumeur alarmée : le nouveau Pontife Aquilodon l'Aveugle de Zakinthe, à propos duquel Zacharias ne parvenait pas à se faire une idée précise, mais pour lequel il éprouvait un minimum de sympathie, parce qu'il s'opposait aux fanatiques, venait juste d'être poignardé en plein office.
Dernière édition par Zacharias Iérothéon le Mar 10 Jan 2012 - 20:42, édité 3 fois