Carnets de Voyage de Helbin Falamur
Première semaine
J’ai quitté Samothrace monté sur un âne. Un autre baudet dont je tenais la bride me suivait, bâté des lourdes sacoches qui renfermaient mon matériel.
J’emportais avec moi de nombreuses vivres, des vêtements chauds, et tout l’équipement nécessaire pour bivouaquer en haute montagne.
Là où je me rendais, il ne régnait que le froid et la solitude.
J’ai cheminé ainsi pendant de longues journées, montant au début insensiblement des côtes qu’on ne distinguait pas, puis la pente est devenue plus raide. Mes mules s’épuisaient plus rapidement.
Finalement, en quittant les montagnes grises, bien que je suivais les vallées en priorité, il me fallut avancer parfois le long de sentiers escarpés, dont certains longeaient des falaises abyssales. Je passais des cols de plus en plus élevés, de plus en plus difficiles à franchir, de plus en plus enneigés. L’air se raréfiait avec l’altitude et mes deux baudets haletaient de plus en plus.
Je suis monté à plus de 1000 toises au-dessus du niveau de la mer. Ce voyage a duré une semaine.
Deuxième semaine
Des pentes à monter et à redescendre, c’était mon quotidien. Et à des lieues à la ronde, pas âme qui vive. J’apercevais seulement quelques animaux parfois : lapins, marmottes, renards, chamois,… Ainsi que de nombreux rapaces.
Ces terres désolées n’appartenaient pas à l’homme, ni à aucune race intelligente de Kalamaï. C’était le royaume de la nature brute, à la végétation abondante. Les flancs des montagnes s’ornaient de profondes forêts de conifères, de buissons touffus, de multiples fleurs.
Je collectais des échantillons pour mon herbier, dans l’espoir de découvrir quelques espèces végétales inconnues.
J’ai croisé sur son promontoire la masse austère et majestueuse du Fort Le Cor. Là-haut, il y avait une présence humaine. Des soldats farouches, sans doute rendus irascibles par leur isolement. Je n’avais pas besoin de les rencontrer, je n’avais rien à leur demander. J’avais bien préparé mon expédition et je disposais de suffisamment de nourriture.
J’ai choisi de m’éloigner un peu plus vers le Nord. Cette fois, j’y étais ! Ces sols lointains n’avaient probablement jamais été foulés par quiconque dans l’empire. Je posais mes pas sur une terre vierge de toute visite. J’étais le premier, l’unique !
Et puis, au soir du dernier jour de cette deuxième semaine, comme je m’apprêtais à camper pour la nuit, j’ai grimpé un dernier raidillon, par acquis de conscience. En espérant voir ce qui m’attendait pour la journée du lendemain. Je n’ai pas été déçu !
Quinzième jour : la vallée
A mes pieds s’étendait une vaste et profonde vallée ponctuée de nombreux bois aux arbres d’essences multiples. Des prairies verdoyantes s’étalaient entre les bosquets. Une rivière qui descendait en torrent de l’éminence où je me trouvais, serpentait lentement d’un bout à l’autre du vallon.
La combe avait le contour un peu irrégulier d’un triangle allongé dont la pointe se trouvait en bas de la butte où j’avais choisi d’installer mon campement. Elle pouvait avoir 10 lieues dans sa plus grande largeur et peut-être 25 lieues de longueur.
J’allais devoir la parcourir longuement et tenter de l’arpenter pour en définir la mesure exacte. D’ores et déjà, je savais que je venais de faire une découverte passionnante. Mes vivres ne me suffiraient pas, et j’allais devoir retourner à Samothrace pour préparer une expédition plus complète, avec de la main-d’œuvre pour m’aider dans ma tâche.
Au centre du triangle fertile s’élevait un tertre à la forme d’un cône. Une haute dune aride, à la végétation rare. Un mamelon rocailleux, aux côtes couvertes de caillasses dont la couleur blonde tranchait sur la verdure qui l’environnait.
Le soleil couchant lui donnait une teinte ocre, mouchetée de quelques rares buissons épineux et dans cette lumière harmonieuse, mon regard fut attiré par quelque chose qui brillait au sommet du mont. Un éclat qui renvoyait la lumière du soleil et clignotait légèrement. Comme un miroir qui réfléchirait les rayons du soleil.
Demain, je descendrais dans la vallée, pour me rapprocher de ce monticule aride qui culminait à plusieurs centaines de toises de hauteur. Je pourrais en atteindre le pied en une journée, il ne devait pas être à plus de neuf ou dix lieues. En terrain plat, mes ânes se déplaceraient plus facilement.
De là, je verrais plus précisément à quoi ressemble ce qui émet ce scintillement opalescent qui rutile sur le bleu du ciel.
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Helbin Falamur,
Explorateur et Cartographe
Dernière édition par Lulyane le Jeu 5 Aoû 2010 - 0:10, édité 4 fois